D’après un arrêt récent du Conseil d’Etat, la reprise d’une provision déductible est imposable, même si elle n’a pas été initialement déduite. La non-déduction entraînant un risque plus important que la déduction, les entreprises devront revoir leurs pratiques et trouver des solutions autorisant une gestion prudente.
Par Benoît Couty, avocat associé, Pichard & Associés.
Dans sa décision Foncière du rond-point(1), le Conseil d’Etat pose le principe selon lequel une provision comptabilisée doit obligatoirement être déduite fiscalement, sauf si une règle fiscale spécifique prévoit qu’elle ne doit pas l’être. Le fait qu’un contribuable ait décidé de ne pas déduire une provision qui aurait dû l’être serait une erreur non opposable à l’administration fiscale. Elle est alors en droit d’imposer la reprise de cette provision tout en autorisant, dans une certaine mesure, une déduction rétroactive(2). A la suite cette décision, il convient donc de s’interroger sur l’expression «provision déductible». En effet, le suffixe «-ible» signifie la possibilité et «déductible», «qui peut être déduit». S’agissant en revanche d’une provision qui doit être déduite ou qui ne peut qu’être déduite, le suffixe «-ive» signifiant une propriété/qualité serait mieux adapté. Ainsi ce qu’on appelle une provision fiscalement déductible par abus de langage serait en fait une provision fiscalement «déductive».
Cette jurisprudence importante consacre le principe de l’alignement fiscalo-comptable(3) qui limite considérablement les possibilités de pilotage du résultat fiscal par le jeu des dotations et reprises fiscales des provisions. Une telle technique pouvait avoir un intérêt pour les sociétés en situation de report déficitaire désireuses de «lisser» leur résultat fiscal depuis que l’utilisation des déficits reportables a été plafonnée. Ce faisant, elle bouleverse au passage...