Le recours à des intervenants extérieurs pour la réalisation de certaines activités est un moyen assez fréquemment utilisé par les entreprises pour se focaliser, ou se recentrer, sur leur cœur de métier et/ou leur savoir-faire. Cette «externalisation» de l’emploi s’effectue soit par de la sous-traitance, soit par du «prêt de main-d’œuvre», une opération par laquelle une entreprise dite «prêteuse» met des salariés, dont elle reste l’employeur, à la disposition d’une autre dite «utilisatrice» pendant une durée déterminée.
Par Fatéma Akbaraly, avocate, et Etienne Pujol, avocat associé, STC Partners
Strictement encadrée par le Code du travail, cette opération devait jusqu’alors être maniée avec beaucoup de prudence dès lors qu’aucune entreprise ne pouvait en tirer un profit financier, sous peine de commettre le délit de prêt de main-d’œuvre illicite et/ou celui de marchandage.
L’ordonnance Macron sur la sécurisation des relations de travail du 22 septembre 20171 suivie de la loi de ratification des ordonnances du 29 mars 20182 ont réformé la réglementation des prêts de main-d’œuvre en offrant aux start-ups et aux petites et moyennes entreprises (PME) la possibilité d’y recourir et de bénéficier des compétences et de l’expertise des salariés de grandes entreprises sans en supporter la totalité des coûts salariaux.
1. L’interdiction de principe du prêt de main-d’œuvre à but lucratif
Jusqu’en 2011, la notion de «but non lucratif» du prêt de main-d’œuvre définie par la Cour de cassation concernait aussi bien l’entreprise prêteuse que l’entreprise utilisatrice. Les juges recherchaient en effet si le personnel était mis à disposition d’une entreprise tierce dans le seul but d’en tirer un bénéfice, un profit ou un gain pécuniaire3. Il y avait notamment bénéfice lorsque l’entreprise prêteuse facturait à l’entreprise utilisatrice un coût supérieur au montant de la rémunération de son salarié mis à disposition. Le caractère lucratif de l’opération était également caractérisé à l’égard de l’entreprise utilisatrice notamment lorsqu’elle réalisait une économie de charges, soit par l’absence de remboursement de toute charge, soit par le remboursement de charges moindres que ce qu’elle aurait eu à verser si les salariés avaient été les siens.