Dans une décision remarquée du 18 mars dernier (décision 2014-453/454 QPC et 2015-462 QPC), le Conseil constitutionnel a déclaré contraire à la Constitution les articles1 fondant la poursuite et la sanction cumulative du délit d’initié par le juge pénal et du manquement d’initié par la Commission des sanctions de l’AMF. Cette décision dont l’effet est différé au 1er septembre 2016 ne va pas manquer d’affecter le rapport de forces entre le régulateur boursier et le monde judiciaire.
Par Bruno Zabala, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre, co-auteur du Mémento Sociétés commerciales, Editions Francis Lefebvre.
Une décision attendue
La jurisprudence nourrie de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) relative à la conformité des différents systèmes de cumul de sanctions administrative et pénale en matière boursière aura fini par s’imposer à l’ordre juridique français. Rappelons que la forteresse française avait encore tout récemment bénéficié du confort de la Cour de cassation qui validait le cumul de sanctions sous réserve de l’application du principe de proportionnalité.
La fin prochaine du cumul de poursuites à la française s’évinçait de la construction jurisprudentielle de la CEDH qui, en dernier lieu dans l’affaire Grande Stevens à l’encontre de l’Italie (CEDH 4-3-2014 n° 18640/108), réaffirmait que, dès lors qu’une décision de nature pénale est devenue définitive, tout acte de poursuite ultérieur (fondé sur les mêmes faits) doit être abandonné.
Le Conseil constitutionnel saisi de trois questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) rappelle dans un premier temps que (i) le principe de nécessité des peines s’applique à toute sanction ayant le caractère d’une punition (et non aux seules peines prononcées par les juridictions pénales) et que (ii) le principe de nécessité des délits et des peines ne fait pas obstacle à ce que les mêmes faits commis par une même personne puissent faire l’objet de poursuites différentes aux fins de sanctions de nature administrative ou pénale en application de corps de règles distincts devant leur propre ordre de juridiction. Le Conseil réserve ainsi le cas des...