La situation sanitaire a donné naissance à un très grand nombre de dispositions d’exception, dont l’une des plus importantes est l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et à l’adaptation des procédures pendant cette même période (1).
Par Bruno Dondero, avocat associé, CMS Francis Lefebvre Avocats
Cette ordonnance a très vite suscité de nombreuses questions, dont une, particulièrement délicate, tient à son impact sur les opérations de dissolution de société avec transmission universelle de patrimoine (TUP) visées à l’article 1844-5, al. 3 du Code civil.
I. Une question délicate…
Aux termes de cette disposition, la dissolution d’une société dont l’associé unique est une personne morale entraîne TUP de la société dissoute à l’associé. Une faculté d’opposition est toutefois ouverte aux créanciers, qui disposent de trente jours à compter de la publication de la dissolution. Ce délai est bien connu des praticiens, car même si les créanciers font rarement usage de leur droit d’opposition, tant la disparition de la personne morale que la TUP ne se réalisent, au plus tôt, «qu’à l’issue du délai d’opposition». Quand une opposition a été formée, ces effets ne se réalisent que lorsqu’elle a été rejetée en première instance ou que, le cas échéant, le remboursement des créances ou la constitution de garanties ordonnés par le juge ont été faits.
L’ordonnance n° 2020-306 a donné aux créanciers un délai supplémentaire pour exercer leur droit d’opposition. Précisément, ce texte a permis qu’une très vaste série d’actes soient accomplis dans un délai supplémentaire, lorsque le délai normalement applicable expirait pendant la «période juridiquement protégée» instaurée par l’ordonnance. Concrètement – et en tenant compte des modifications apportées au texte – un délai d’opposition qui expirerait entre le 12 mars 2020...