L’AMF vient d’adopter une position-recommandation (n° 2015-05) sur les cessions et acquisitions d’actifs significatifs par les sociétés cotées (la «Position-Recommandation»). Celle-ci résulte des conclusions d’un groupe de travail (le «Groupe de Travail») constitué par l’AMF à la suite des critiques soulevées en matière de processus de décision et d’information du marché lors des ventes de SFR par Vivendi et de la branche énergie par Alstom à General Electric.
Par Hubert Segain, associé département corporate et managing partner, et Alexandra Salanson, professional support lawyer, Herbert Smith Freehills Paris.
La Position-Recommandation s’applique à toute société dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé (une «société cotée») et impacte principalement le calendrier d’une opération de cession ou d’acquisition, son déroulement ainsi que la communication aux actionnaires et au marché.
1. Impact sur le calendrier
1.1. Principe : un vote consultatif des actionnaires avant la cession d’une majorité d’actifs
L’AMF recommande à ce que toute société cotée consulte préalablement l’assemblée générale ordinaire sur la cession, en une ou plusieurs opérations, de la majorité de ses actifs. Les promesses ou options de vente sont également visées.
La «majorité de ses actifs» signifie, selon l’AMF, 50 % ou plus des actifs de la société cédante. Ce seuil sera atteint dès lors qu’au moins deux ratios parmi les cinq suivants atteignent ou dépassent la moitié du montant consolidé calculé pour la société cédante en moyenne sur les deux exercices précédents :
– le chiffre d’affaires des actifs cédés rapporté au chiffre d’affaires consolidé ;
– le prix de cession des actifs rapporté à la capitalisation boursière du groupe ;
– la valeur nette des actifs cédés rapportée au total de bilan consolidé ;
– le résultat courant avant impôts généré par les actifs cédés rapporté au résultat courant consolidé avant impôts ;
– les effectifs salariés de l’activité cédée rapportés aux effectifs mondiaux du groupe.
1.2. Est-il possible de renoncer à cette consultation préalable ?
L’AMF admet que l’intérêt social de la société puisse justifier d’écarter la consultation préalable des actionnaires. Des exemples ont été donnés par le groupe du travail :
– une société dont la viabilité est en jeu pour laquelle une cession très rapide d’actifs importants est impérative ;
– un acquéreur qui présente une offre très intéressante en la subordonnant à une cession dans des délais très courts ;
– une société, ayant pour activité principale l’acquisition et la gestion de participations, qui vend des actifs dans le cycle normal de son activité.
Mais toute renonciation nécessitera une explication selon le principe «appliquer ou expliquer». L’AMF précise qu’une société doit fournir aux actionnaires et au marché une explication «compréhensible, pertinente et convaincante» des raisons pour lesquelles elle estime qu’il est conforme à l’intérêt social d’écarter la consultation. De même, une société qui ne retient pas les critères de l’AMF pour apprécier si le seuil de 50 % est atteint doit justifier de la pertinence des critères alternatifs qu’elle a utilisés.
1.3. Conséquences en cas de vote négatif de l’assemblée générale
Sur le plan du droit des sociétés, le vote de l’assemblée générale ne peut pas être considéré comme juridiquement contraignant car...