La Commission européenne a publié le 28 mai dernier un rapport sur la fiscalité de l’économie numérique qui répond à des propositions avancées par l’OCDE au mois de mars. Ces propositions prêtent à discussion.
Par Pierre-Jean Douvier, avocat associé et Juliana Benamran, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre.
1. Position de la Commission européenne sur les propositions de l’OCDE
L’Action 1 du plan dit «BEPS»(1) de l’OCDE propose de «relever les défis fiscaux posés par l’économie numérique». Les règles d’établissement stable prévues dans les conventions fiscales bilatérales – inspirées des préconisations de l’OCDE – pourraient évoluer. Elles prévoient qu’une entreprise exerçant des activités dans plusieurs pays est imposable dans celui de son siège de direction effective, sauf si elle dispose d’un établissement stable dans un autre pays, au travers d’une présence physique : installation fixe d’affaires ou «agent» habilité à négocier des contrats en son nom.
1.1. Contexte
Faut-il revoir ces règles d’attribution des bénéfices (et des pertes), à présent que la technologie numérique a bouleversé les modèles économiques traditionnels, permettant d’exercer des activités à distance ? La question se pose de savoir si Internet a vraiment introduit des bouleversements ou s’il s’agit d’une modalité supplémentaire de mise en œuvre des opérations commerciales. On doit donc se demander s’il faut introduire des propositions de modifications qui seraient, elles, bouleversantes, ou alors de simples adaptations. Lors de la conférence d’Ottawa en 1998 (et des discussions qui ont suivi), l’OCDE avait conclu que ce n’était pas nécessaire.
Parallèlement, de grands groupes de l’Internet ont émergé depuis, payant trop peu d’impôt selon les administrations fiscales en quête de ressources budgétaires.
Si les conclusions de l’OCDE sont attendues pour septembre, deux propositions de modification ont déjà été faites dans un premier document publié en mars : la suppression ou l’ajustement de l’exception prévue pour les activités à caractère préparatoire ou auxiliaire, et la caractérisation d’un établissement stable sur le fondement de la «présence numérique significative».