Alors que la vague de réclamations en matière de prélèvement sociaux français appliqués aux revenus fonciers et plus-values immobilières des non-résidents se poursuit, relayée par la presse (cf. notamment notre article du 16/02/2015 dans ces colonnes), la CJUE vient de rendre un arrêt attendu et qui viendra alimenter le débat actuel (arrêt du 26/02/2015, aff. C-623/13, de Ruyter).
Par Pierre-Jean Douvier, avocat associé et Xenia Lordkipanidzé, avocat, CMS Bureau Francis Lefebvre.
Une question préjudicielle a en effet été posée à la CJUE par le Conseil d’Etat sur la pertinence de l’application de prélèvements sociaux français sur les revenus du patrimoine des personnes affiliées à un système de sécurité sociale dans un autre Etat à la lumière du règlement n° 1408/71 visant à la coordination des législations nationales en matière de sécurité sociale et ce, afin d’assurer la libre circulation des travailleurs au sein de l’UE.
Le contribuable était domicilié en France mais soumis à la sécurité sociale aux Pays-Bas où il exerçait son activité professionnelle. Assujetti en France aux prélèvements sociaux sur ses revenus du patrimoine, il a invoqué le règlement n° 1408/71 afin de contester ces derniers.
La CJUE considère qu’il existe un lien direct et pertinent entre les prélèvements en cause et la législation de sécurité sociale française. Les prélèvements sociaux grevant les revenus du patrimoine des résidents de France (et, selon la nature des revenus, des non-résidents) viennent en effet financer le système français de sécurité sociale. Dès lors, le principe d’unicité de législation de sécurité sociale applicable au sein de l’UE et prévu par le règlement n° 1408/71 s’applique à ces prélèvements. La règle de conflit posée par le règlement étant absolue (sauf exception expresse), l’application de celui-ci ne se limite pas aux revenus tirés d’une activité professionnelle. Il en résulte qu’un contribuable cotisant à raison de ses revenus professionnels dans un Etat ne peut être également soumis à des prélèvements finançant la sécurité sociale d’un autre Etat sur ses revenus du patrimoine.