La Cour de cassation vient de rendre un intéressant arrêt en matière de mesures d’instruction in futurum et de legal privilege (Civ. 1re 3 novembre 2016, n°11601200).
Par Sébastien Vialar, avocat associé, STC Partners
On rappellera que l’article 145 du Code de procédure civile permet à une partie d’obtenir le concours du juge pour obtenir des preuves détenues chez son adversaire avant d’engager un procès au fond, le plus souvent sans que la partie adverse n’en soit avertie. L’irruption chez un concurrent d’un huissier de justice muni d’une ordonnance l’autorisant à prendre copie de ses e-mails, fichiers clients, mailings, factures, etc. est un procédé redoutablement efficace, particulièrement en matière de concurrence déloyale.
La jurisprudence contrôle de plus en plus étroitement le respect des critères de l’article 145 (motif légitime, utilité de la mesure, proportionnalité, respect des droits adverses).
On sait depuis longtemps que la partie qui supporte la mesure ne peut opposer à l’huissier le secret des affaires pour refuser de communiquer des documents (Civ. 2e, 7 janvier 1999, solution confirmée encore récemment par Com. 10 février 2015).
La question était posée de savoir si une partie américaine faisant l’objet d’une mesure d’instruction exécutée en France pouvait s’opposer à la communication des échanges entre ses conseils internes et externes couverts par le legal privilege en vertu de la loi américaine, droit applicable au fond dans le cadre du futur procès.
La Cour de cassation rend une décision intéressante à plusieurs titres : (i) elle rappelle tout d’abord que la mise en œuvre des mesures d’instruction en vertu de l’article 145 du Code de procédure civile est soumise à la loi française, peu important le droit applicable au fond du litige ; (ii) elle relève ensuite que les échanges en cause étaient intervenus entre des juristes qui n’avaient pas la qualité...