L’affaire Madoff aura eu au moins quelque intérêt : celui de faire avancer la réglementation dans le sens d’une meilleure protection des investisseurs ; celui aussi d’apporter des réponses à certaines questions juridiques en suspens. A ce titre, un arrêt rendu par la Cour de cassation le 25 novembre dernier mérite d’être évoqué.
Par Arnaud Reygrobellet, professeur à l’université Paris X,
of counsel, CMS Bureau Francis Lefebvre
Etait en cause ici non le très fameux fonds Luxalpha Sicav, mais celui, dont UBS était également dépositaire, «Groupement Financier Ltd». Il s’agissait d’un OPCVM de droit des Iles Vierges Britanniques dont les actifs avaient été investis auprès de Bernard Madoff Investment Securities (BMIS). Le litige qui nous intéresse est né du fait qu’une société française avait demandé à une banque française de souscrire des parts de ce fonds. La banque a transmis ces ordres à sa succursale luxembourgeoise.
Lorsque la fraude Madoff a éclaté au grand jour, la société ayant investi dans le fonds a tenté comme beaucoup d’autres de rechercher la responsabilité de la banque ayant agi en l’occurrence au titre d’une simple réception-transmission d’ordres (RTO). Elle obtient gain de cause, mais très partiellement.
La société avait d’abord tenté d’obtenir restitution de l’intégralité de l’investissement réalisé en plaidant que l’ordre donné avait été imparfaitement exécuté, dès lors que la souscription des parts du fonds avait été réalisée par la banque (les registres du fonds mentionnaient la banque comme titulaire des parts nominatives) en son nom propre alors qu’il aurait dû être exécuté au nom de la société cliente. Ce faisant, la banque aurait agi comme commissionnaire et non comme mandataire, sans en avoir préalablement informé son client, a fortiori sans avoir recueilli son consentement ; grief qui est effectivement de nature à entraîner l’inopposabilité de l’ordre au client, donc la restitution de l’intégralité des sommes versées (arrêt du 13 déc. 2011).