Dans une décision du 28 février 2018 (n° 16-50.015, Société Wolters Kluwer France), la Cour de cassation a annulé l’arrêt de la cour d’appel de Versailles qui avait jugé qu’une réorganisation frauduleuse dans un groupe de sociétés n’est pas opposable aux salariés pour le calcul de leur participation aux résultats de l’entreprise.
Par Emmanuelle Féna-Lagueny, avocat counsel, CMS Francis Lefebvre Avocats
Un groupe néerlandais détenant en France 11 structures juridiques avait procédé à une vaste réorganisation en juin 2007 de ses activités. A cette fin, une société française du groupe avait emprunté auprès de sa société mère française, société holding, 445 millions d’euros, remboursables sur 15 ans. Cette opération d’emprunt avait eu pour effet d’assécher complètement le versement de la participation des salariés des années 2007 et suivantes.
Certains syndicats ont assigné (dans un contexte social par ailleurs conflictuel) la société emprunteuse et sa société mère afin de voir déclarer l’opération de restructuration inopposable aux salariés et d’obtenir la condamnation des deux sociétés à reconstituer une réserve spéciale de participation pour les années en cause.
Ils avaient obtenu gain de cause devant la cour d’appel de Versailles (2 février 2016, n° 15/01292) qui a estimé que l’opération de restructuration, compte tenu notamment du taux de l’emprunt jugé trop élevé et de son caractère fiscalement très avantageux, était «constitutive d’une manœuvre frauduleuse à l’égard du comité d’entreprise et des salariés» et était donc inopposable aux salariés dans ses effets sur le montant de la réserve spéciale de participation.
La Cour de cassation casse et annule la décision par un arrêt assez lapidaire. La Cour rappelle que, selon le texte de l’article L. 3326-1 du Code du travail, le montant du bénéfice net et celui des capitaux propres de l’entreprise sont établis par une...