L’augmentation rapide du potentiel des technologies numériques, particulièrement forte cette dernière décennie, a fait émerger de nouveaux modèles d’affaires. Cette évolution a nui à l’efficacité du système fiscal international qui repose traditionnellement sur le critère de la présence physique. Afin d’éviter que l’effectivité de l’impôt ne devienne inversement proportionnelle aux avancées technologiques, l’OCDE s’est emparée du sujet avec le Pilier 1.
Par Vincent Desoubries, avocat associé, Pierre Bonamy, avocat manager, et Justine Zavoli, économiste, Arsene
L’objectif du Pilier 1 est d’allouer de la matière imposable aux juridictions de marché. Initialement centré sur les géants du numérique, le champ d’application du dispositif s’est élargi au cours des derniers mois. Dans le blueprint publié par l’OCDE en août 2020, les entreprises en relation étroite avec les consommateurs étaient concernées au même titre que celles réalisant des services numériques automatisés. Finalement, en juillet dernier, l’OCDE s’est affranchie de tout critère d’activité pour ne retenir qu’un seuil de chiffre d’affaires consolidé (20 milliards d’euros). Cet élargissement résulte d’une campagne américaine – les US ne voulaient pas être les seuls à régler l’addition avec leurs GAFA – mais aussi du constat que les défis de la digitalisation transcendent les industries et les secteurs.
Dans sa philosophie, le Pilier 1 est (relativement) simple à assimiler. Il se décompose en trois étapes. La première est la détermination d’un surprofit (c’est-à-dire la part de l’EBIT qui excède 10 % du CA) dont une fraction (entre 20 et 30 %, le chiffre n’a pas encore été arrêté) représente le montant A. Dans un deuxième temps, ce montant A est alloué aux juridictions de marché au prorata de leurs chiffres d’affaires (CA pays/CA consolidé). Enfin, les entités payeuses de la charge d’impôt supplémentaire ainsi créée sont identifiées (voir ci-après). L’application du Pilier 1 sera en revanche complexe. D’une part, et c’est un point essentiel, le Pilier 1 vient s’ajouter au...