La mondialisation et la construction européenne se sont traduites par un accroissement des flux de personnes et de capitaux à travers le globe. A titre d’exemple, le nombre de Français établis à l’étranger en 2018 était estimé à 2 millions(1) tandis que 4,8 millions de personnes de nationalité étrangère vivaient en France(2). Dans ce contexte d’internationalisation croissante, il est de plus en plus fréquent que la situation patrimoniale ou familiale du dirigeant d’entreprise présente au moins un élément d’extranéité (expatriation d’un membre de la famille, investissements à l’étranger, etc.). Des règles de droit international privé et de fiscalité internationale viennent alors se superposer aux problématiques habituellement rencontrées par les dirigeants souhaitant protéger leur patrimoine. Il est dès lors indispensable de mettre en place des outils juridiques et fiscaux adaptés à chaque configuration individuelle afin de garantir la protection patrimoniale du dirigeant à l’international.
Par Marie-Lorraine Henry, avocat associé, et Amandine Sixdenier, juriste, Fidal
L’ensemble des outils abordés dans cet article peuvent également être envisagés par le dirigeant, dans la période de crise que nous traversons en ce moment avec le Covid-19. En effet ces outils d’anticipation patrimoniale ont pour but également de l’aider à traverser ce type d’imprévu.
1. Une protection matrimoniale : un préalable nécessaire à prévoir dans un contexte international
1.1. Les enjeux matrimoniaux du dirigeant à l’international
Contrairement aux idées reçues, le sort de l’entreprise du dirigeant marié dépend aussi de son régime matrimonial. L’application des règles régissant les rapports pécuniaires entre époux permettra de qualifier les titres sociaux en tant que biens communs, propres ou personnels. La qualification juridique de l’entreprise aura des conséquences directes quant à la possibilité pour le dirigeant, ou ses héritiers, de la conserver à la suite de la liquidation du régime matrimonial.
1.2. Un premier conseil : faire précéder son mariage par la signature d’un contrat
En présence d’éléments d’extranéité, la question du régime matrimonial du dirigeant peut être cruciale. Aucun époux ne souhaite que le choix de son régime matrimonial soit laissé à un tribunal dont les décisions rendues pourront varier d’un Etat à l’autre. Cela sera pourtant le cas lorsque les époux n’auront pas fait de choix de loi applicable à leur régime matrimonial, puisqu’il faudra alors s’intéresser aux règles de droit permettant de le définir.
En droit international privé français, il faut savoir que coexistent trois systèmes juridiques : le droit commun français, la Convention de La Haye du 14 mars 1978 sur la loi applicable au régime matrimonial et le règlement européen du 24 juin 2016 en matière de régimes matrimoniaux(3). Le système compétent dépendra de la date à laquelle les époux se sont mariés.