Depuis le 1er janvier 2020, les administrations fiscale et douanière sont autorisées à collecter et traiter de façon automatisée des données personnelles afin de lutter contre la fraude. Bien que cette expérimentation de trois ans soit encadrée par la loi, elle pose la question de l’atteinte au respect de la vie privée.
Par Anne-Laure Villedieu, avocat associé, Stéphanie Némarq-Attias, avocat counsel, et Alexandre Ganthy, juriste, CMS Francis Lefebvre Avocats
L’article 154 de la loi de finances pour 2020 du 28 décembre 2019 vise à améliorer la détection de la fraude et le ciblage des contrôles fiscaux au moyen de la collecte massive de données. Par suite, seuls seraient exploités – au moyen de traitements informatisés et automatisés n’utilisant aucun système de reconnaissance faciale – les contenus librement accessibles sur les plateformes en ligne rendus publics par leurs utilisateurs.
Ce dispositif expérimental devrait être encadré par un décret en Conseil d’Etat à paraître prochainement, après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
1. Des outils d’investigation de plus en plus perfectionnés
Si les outils d’investigation ne peuvent utiliser aucun système de reconnaissance faciale, la notion de «traitement informatisé et automatisé» demeure étendue. Comme le relève la CNIL1, il peut s’agir d’opérations manuelles à partir de moyens informatisés ou de traitements automatisés algorithmiques, s’inscrivant le cas échant dans une logique d’auto-apprentissage.
L’utilisation de technologies numériques au service de la lutte contre la fraude fiscale s’inscrit dans une démarche initiée dès 2008 avec la création de la Délégation nationale à la lutte contre la fraude (DNLF). Depuis 2013, l’administration fiscale développe un traitement automatisé de données dénommé «ciblage de la fraude et valorisation des requêtes» (CFVR) qui consiste à appliquer des méthodes statistiques sur des informations en provenance de diverses bases de données. En pratique, l’outil doit permettre d’analyser par exemple, la cohérence des données cadastrales, du fichier de la taxe d’habitation, de l’impôt sur le revenu et des comptes bancaires.
L’administration des douanes et...