Alors que le Conseil d’Etat a, lors de ces derniers mois, eu l’occasion de préciser sa grille de lecture en matière d’abus de droit (1 et 2), la cour administrative d’appel de Versailles a apporté d’intéressantes précisions quant au dispositif anti-abus prévu aux articles 119 bis et 119 ter du CGI s’agissant de l’exonération de retenue à la sourcedes sociétés mères européennes (3).
Par Siamak Mostafavi, avocat associé, et Nicolas André, avocat, Jones Day
1. La décision Natixis du 11 mai 2015 (1)
Le Conseil d’Etat a été amené, de nouveau, à analyser l’application des principes d’abus de droit au régime d’exonération des sociétés mères (articles 145 et 216 du CGI). En l’occurrence, une institution financière française avait reçu des dividendes d’une filiale néerlandaise qui avait comme seul actif des obligations émises par une institution financière américaine. La société mère avait opté pour l’exonération de ces dividendes, et l’administration avait conclu à leur taxation en considérant que la création de la filiale néerlandaise poursuivait un but exclusivement fiscal.
Devant le Conseil d’Etat, la société soutenait, à titre principal, l’application du régime des sociétés mères, et, à titre subsidiaire, l’application de l’avoir fiscal (article 158 bis du CGI) (2), la société hollandaise ayant été, après une première période d’exonération, soumise à l’impôt néerlandais au titre des revenus du portefeuille obligataire.
La cour administrative d’appel de Versailles (CAA), ayant décidé en faveur de l’administration, avait considéré que celle-ci avait apporté la preuve de l’absence de substance économique de la filiale. A ce titre, la Cour avait relevé, d’une part, que la filiale n’avait qu’une activité de gestion patrimoniale (c’est-à-dire un revenu composé uniquement d’intérêts et de plus-values au titre des obligations) et, d’autre part, que la politique d’investissement de la filiale avait été décidée une fois pour toutes lors de sa création, de sorte que l’actionnaire ne...