Dans le domaine contractuel, ces derniers mois ont été marqués par le nouvel élan donné à la réforme du droit des contrats et des obligations. Depuis la loi du 28 janvier 2015, habilitant le gouvernement à procéder par voie d’ordonnance, cette réforme tant attendue et en gestation depuis dix ans, n’a jamais été aussi proche de devenir réalité.
Par Arnaud Burg, avocat associé, DS Avocats avec la participation de Clément Truchon-Bartès
Un précédent article avait abordé l’impact de cette réforme sur les pactes et notamment sur les promesses de vente ou pactes de préférence y figurant généralement. Nous souhaiterions examiner dans le présent article l’impact de la réforme sur les contrats de longue durée.
En effet, parmi les changements annoncés par le projet de réforme, un semblait particulièrement prometteur pour une partie de la doctrine qui l’attendait depuis longtemps : la consécration dans notre droit positif de la théorie de l’imprévision.
Traditionnellement, l’imprévision est un terme désignant une situation dans laquelle un contrat se trouve déséquilibré par la survenance d’un événement que les parties n’avaient pas prévu au moment de la formation du contrat.
Or, dans ce domaine, la Cour de cassation fait preuve d’une constance irréprochable depuis le 6 mars 1876 et le fameux arrêt du «Canal de Craponne».
Mettant fin à une pratique galopante de révision des contrats par les tribunaux civils, la Cour de cassation affirmait clairement dans cet arrêt qu’en aucun cas «il n’appartient aux tribunaux, quelque équitable que puisse leur paraître leur décision, de prendre en considération le temps et les circonstances pour modifier la convention des parties et substituer des clauses nouvelles à celles qui ont été librement acceptées par les contractants».
Malgré un changement profond des circonstances affectant l’économie du contrat, le juge civil refusait ainsi de modifier ses termes afin que l’équilibre soit retrouvé, quitte à ce que cette inertie cause la ruine d’une partie. La part belle était donc faite à la force obligatoire du contrat, socle de notre Code civil, et malgré le feu des critiques la position des juges civils restait ferme.