L’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 mai 2014 (n° 14/03884) permet d’aborder plusieurs sujets d’une grande importance pour les praticiens du droit des affaires, qu’il s’agisse du risque pour une partie à un contrat, des modalités de réparation du préjudice subi par un tiers, ou encore de la portée de l’obligation de loyauté incombant aux parties pour la réalisation des conditions suspensives prévues à un contrat.
Par Franck Bourgeois, avocat associé, Eversheds LLP.
Au cas d’espèce, un tiers acquéreur (le «Tiers») avait proposé d’acquérir les actions détenues par un actionnaire cédant (le «Cédant»), lequel, afin de pouvoir procéder à cette cession, devait préalablement purger le droit de préemption dont bénéficiait son coactionnaire (le «Coactionnaire»), en application de statuts de la société dont les actions étaient cédées.
Le projet de cession avait donc été conclu avec le Tiers sous la condition suspensive du non-exercice par le Coactionnaire de son droit de préemption. Le Coactionnaire notifia cependant l’exercice de son droit de préemption, tout en différant la date d’acquisition effective des actions concernées.
Le Cédant ne contesta pas cette décision de différer la date d’acquisition, apparemment en raison d’un accord séparé intervenu entre la société mère du Cédant et le Coactionnaire. Il semble donc que le Cédant se soit contenté de rester silencieux sur la possibilité pour le Coactionnaire de différer la date d’acquisition. Le Tiers, en revanche, s’opposa à l’application d’un droit de préemption qui puisse être autre chose qu’un mécanisme de substitution pure et simple. Selon lui, tout écart, concernant notamment la date d’acquisition des actions, par rapport aux termes de l’offre initiale devait se traduire par l’invalidation de l’exercice du droit de préemption.
Le Tiers chercha donc à faire invalider par le Tribunal de commerce de Paris l’exercice de ce droit.
1. Mise en cause de la responsabilité d’un cocontractant par un tiers au contrat
La règle de principe est, rappelons-le, celle posée par l’article 1165 C. civ., selon lequel «les conventions n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes ; elles...