Petit cas pratique : imaginez-vous détenir une seule des 3 000 parts composant le capital social d’une SARL. L’associé majoritaire, détenant la quasi-totalité des autres parts, les cède à un acquéreur. Il vous propose de céder votre part unique avec lui, et vous signez ensemble un acte de cession.
Il est convenu un prix global de 380 000 euros, et le prix est versé aux cédants à hauteur de 300 000 euros. Vous n’en récupérez que la fraction correspondant à une part (100 euros), le majoritaire récupérant le reste. Mais le prix avait été arrêté sous réserve que soit dressée une situation comptable intermédiaire, qui se révèle catastrophique et entraîne le jeu de la clause de révision du prix contenue dans l’acte. Le prix est finalement fixé à… 1 euro pour l’ensemble des parts. Le cessionnaire demande alors restitution de la somme versée.
Question : peut-on vous demander :
(a) 100 euros ?
(b) 300 000 euros ?
La réponse (a) semble évidente, la réponse (b) apparaissant quant à elle absurde : comment justifier que la perception d’un prix de 100 donne lieu en cas de restitution au versement de… 300 000 ? Pourtant, c’est bien la réponse (b) qui est retenue par un arrêt rendu le 30 août 2023 par la chambre commerciale de la Cour de cassation et publié au Bulletin1. Le cédant d’une seule part sociale se voit donc bien condamné à restituer au cessionnaire le prix correspondant à la cession de 3 000 parts !
Cette situation étonnante a toutefois une explication juridique incontestable. Les cédants des 3 000 parts ont contracté ensemble avec le cessionnaire, et ils ont convenu et reçu un prix global. Ils sont donc en position, au moment de restituer le prix, de codébiteurs, tenus ensemble à la même dette. Or, en présence de codébiteurs, peut jouer la règle dite de la solidarité passive, qui permet d’exiger d’un seul des codébiteurs le paiement de 100 % de...