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Taux d’intérêt « de marché » et financement intragroupe : une preuve contraire redevenue possible

Publié le 14 janvier 2022 à 11h30

Fidal Avocats    Temps de lecture 9 minutes

Dans sa décision BSA de 2020 le Conseil d’Etat (« CE ») était venu préciser les moyens de preuve acceptables pour permettre à une société française de prouver, lorsqu’elle verse à une société liée des intérêts à un taux supérieur à celui prévu par l’article 39,1-3° du Code général des impôts (« CGI »), que ces intérêts sont bien au plus égaux à ceux qu’elle aurait pu verser à un établissement ou organisme financier indépendant comme l’indique l’article 212 du même code et donc fiscalement déductibles. Ces précisions apportées, il avait renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel (« CAA ») de Versailles, qui dans son arrêt du 29 décembre 2021 a estimé que les éléments fournis par l’emprunteur étaient effectivement probants.

Par Gilles Vincent du Laurier, avocat associé, et Serge Lambert, avocat, Fidal

1. Rappel : la décision SA BSA[1], ou la critique de la méthode retenue par les juges du fond

La société BSA Finances, faisant partie du groupe intégré dont la mère est BSA, avait fait l’objet d’un redressement par l’administration fiscale pour des emprunts intragroupes, au motif qu’elle n’apportait pas la preuve prévue par l’article 212 précitée.

En l’espèce, la société, pour apporter cette preuve, avait décomposé les taux d’intérêt (fixes) pratiqués par une comparaison établie sur la base de trois composantes :

– un contrat d’échange de taux (swap taux variable/fixe) permettant de donner une équivalence, à la date de l’emprunt, entre un taux variable du marché interbancaire et un taux fixe sans marge ;

– une prime d’annulation qui venait rémunérer le prêteur pour la faculté donnée à l’emprunteur de rembourser de manière anticipée ; et

– une marge de crédit.

La société démontrait ensuite, à l’aide de diverses analyses économiques, que chacune de ces trois composantes était au plus égale à un prix de marché et que donc le taux résultant de l’addition de ces composantes était un taux « de marché » satisfaisant la condition prévue par l’article 212. La CAA de Versailles, dans son arrêt du 25 juin 2019[2] infirmant le jugement rendu par le tribunal administratif de Montreuil[3], avait rejeté l’ensemble des justifications avancées par le contribuable et confirmé le redressement proposé par l’administration.

Le CE a cependant censuré l’arrêt de la CAA (CE 11 décembre 2020, n° 433723, SA BSA). En résumé, le CE a reproché à la CAA de n’avoir pas suffisamment pris en compte les éléments qu’avait produits la société pour tenter de démontrer que le taux pratiqué était bien conforme à un taux de pleine concurrence qu’elle aurait « pu obtenir » (et non pas qu’elle aurait « obtenu », la nuance est importante) d’un prêteur indépendant.

En particulier, concernant la composante « marge de crédit », la seule en lien avec les caractéristiques spécifiques de la société emprunteuse, le CE a jugé qu’« en estimant que la société n’établissait pas que les taux de marge appliqués étaient conformes aux taux...

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