Peut-on être imposé sur un dividende que l’on n’a pas effectivement perçu et que l’on a abandonné à un tiers ? A cette question, le Conseil d’Etat répond positivement. Prudence donc en de telles circonstances.
Par Eric Ginter, avocat associé, Cabinet Hoche, professeur associé à l’Université de Bourgogne.
Dans l’affaire dont le Conseil avait à juger, un chef d’entreprise bien connu avait créé avec son épouse une fondation reconnue d’utilité publique dotée de 1,5 million d’euros à laquelle il avait au surplus abandonné irrévocablement pour une durée de cinq ans ses droits aux dividendes de sa société. En de telles circonstances, l’intéressé avait considéré qu’il ne devait pas être imposé sur lesdits dividendes puisqu’il ne les avait pas effectivement perçus. Cette analyse n’a pas été partagée par l’administration fiscale qui a réintégré les sommes en cause dans ses revenus taxables. La haute juridiction a confirmé l’analyse de l’administration en faisant application au cas d’espèce de sa jurisprudence traditionnelle selon laquelle sont imposables tous les revenus dont un contribuable a pu «disposer» au cours d’une année civile. La notion de «disposition» ne se confond pas avec celle de l’encaissement effectif : elle signifie simplement qu’à un moment, ce moment fût-il un instant de raison, le contribuable a été juridiquement en possession d’un revenu et qu’il a pu décider de son affectation. Il existe de nombreux exemples d’une telle situation : lorsque, par exemple, un dividende est laissé en compte courant dans une société ou délégué au remboursement des créanciers de l’actionnaire.
Dans de tels cas, celui-ci est réputé avoir eu, un instant de raison, la «disposition» des sommes en cause et les avoir affectées à un emploi déterminé par lui. Dans cette affaire, le rapporteur...