On sait que le transfert du siège d’une société française à l’étranger entraîne en principe les conséquences fiscales d’une cessation d’entreprise, notamment l’imposition immédiate des plus-values latentes relatives aux éléments de l’actif immobilisé.
Par exception, le paiement de l’IS correspondant à de telles plus-values peut être étalé sur cinq ans lorsque le siège social est transféré vers un autre Etat membre de l’UE. Le législateur avait introduit cette possibilité d’étalement de l’IS en 2012 afin de garantir le respect de la liberté d’établissement protégée par le droit de l’UE.
Pouvait-on en conclure pour autant que les transferts de siège vers un autre Etat de l’UE ouvrent toujours droit à l’option pour l’étalement ? Non, a répondu le Conseil d’Etat dans une décision récente (CE, 29 novembre 2024, n° 473237, FG Investissements).
Encore faut-il que la société demeure assujettie à l’IS en France postérieurement au transfert de son siège social, c’est-à-dire qu’elle maintienne une activité imposable en France.
Dans le cas contraire, la perte de la qualité d’assujetti à l’impôt français est assimilée à une cessation d’entreprise. Les plus-values latentes relatives aux éléments d’actif transférés en même temps que le siège social sont alors imposables immédiatement, indépendamment de la date à laquelle l’administration a connaissance du transfert de siège.
Cette solution apparaît comme la transposition, en matière de plus-values latentes, de celle qui a été retenue en 2020 s’agissant des bénéfices non encore imposés (CE, 9 juin 2020, n° 418913, Gervais S. Industries).
Elle peut néanmoins paraître sévère, puisque l’administration elle-même admet l’option en cas de transfert du siège social statutaire vers un autre Etat de l’UE (BOI-IS-CESS-30, n° 40), sans la subordonner au maintien de la qualité d’assujetti.
On regrettera aussi que la question de la compatibilité d’une telle solution avec le droit de l’UE n’ait pas été débattue, alors que les dispositifs d’imposition à la sortie (exit tax) font aujourd’hui l’objet d’une jurisprudence nourrie de la CJUE et d’un encadrement par la directive ATAD.