Pour présenter une force d’opposition aux financiers cherchant à acquérir des réserves foncières agricoles dans un but spéculatif, le législateur a voulu renforcer les droits de préemption des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) et imposer les sociétés de portage de foncier agricole. Il n’a toutefois pas été pleinement suivi par le Conseil constitutionnel.
Par Arnaud Langlais, avocat associé, DS Avocats
L’image est forte : 1 700 hectares de terres sont achetés par un Chinois en 2016 ! Il n’en fallait pas plus pour que se déchaînent les passions contre la financiarisation des terres agricoles. Selon les uns, après les domaines viticoles, les financiers s’intéressent maintenant aux terres agricoles, pour se les approprier. Cette intervention a pour résultat l’augmentation des prix du foncier agricole et rend donc l’accès à la terre plus difficile pour les exploitants agricoles ce qui pourrait aboutir à terme à une remise en cause du modèle agricole, français et à l’autonomie alimentaire. En l’espèce, la société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) n’avait pas pu faire jouer son droit de préemption car il ne s’agissait pas ici d’une cession totale des titres mais uniquement d’une cession partielle contre laquelle elle était impuissante.
Il n’en fallait pas plus pour que le législateur s’érige en défenseur des agriculteurs et introduise l’idée d’une extension du droit de préemption des Safer en cas de cession partielle du capital d’une société agricole.
La loi de programmation agricole de 2014 avait déjà prévu que les Safer bénéficieraient d’un droit de préemption portant sur la totalité des parts sociales ou des actions dans le cadre d’une cession de l’intégralité du capital d’une société agricole, mais cela n’avait pas suffi en l’espèce pour contrer l’action de l’investisseur étranger qui avait souhaité acquérir uniquement une participation pour contourner le risque de voir la Safer exercer son droit de préemption.