Trois ans après la promulgation de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, le ministère de la Justice vient de publier une circulaire (ci-après la « Circulaire ») qui traduit une volonté de mobilisation sur ce sujet. L’institution judiciaire est ainsi invitée à adapter son organisation et ses méthodes de travail pour faire face à l’augmentation des dossiers qui lui sont transmis par l’administration fiscale, et à renforcer ses échanges avec elle.
Alors même que le nombre de contrôles fiscaux a été ralenti en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19, le nombre de dossiers de fraude fiscale transmis entre 2018 et 2020 a augmenté de plus de 50 %. Ces chiffres confirment la lame de fond pressentie au lendemain du vote de la loi fraude : la volonté de l’Etat de durcir son action est devenue une réalité.
Le présent article, sans prétendre à l’exhaustivité, vise à attirer l’attention sur les points qui nous semblent avoir le plus de conséquences pour les contribuables.
1. Les dossiers de dénonciations obligatoires transmis au parquet doivent désormais comprendre les observations du contribuable
Jusqu’à présent, les dossiers transmis au parquet dans le cadre des dénonciations obligatoires ne comprenaient que des documents établis par l’administration fiscale (un courrier d’accompagnement, la proposition de rectification et la réponse de l’administration aux observations du contribuable).
La Circulaire indique qu’ils comprendront désormais systématiquement les observations formulées par le contribuable en réponse à la proposition de rectification.
Il est heureux que la voix du contribuable puisse enfin être portée à la connaissance du procureur de la République dès la transmission du dossier, afin de laisser à ce dernier la possibilité d’instruire également à décharge, et de décider en meilleure connaissance de cause de l’opportunité des poursuites.
Nous ne saurions que trop recommander aux contribuables d’être particulièrement vigilants dans la rédaction de leurs observations, en ce qui concerne le fond du dossier mais aussi les pénalités.
Une question nous semble rester en suspens s’agissant des procédures d’imposition d’office. Pour ce type de procédures, particulièrement utilisées en matière d’établissement stable, le Livre des procédures fiscales ne prévoit pas que le contribuable puisse présenter ses observations. En règle générale, l’administration fiscale permet toutefois au contribuable, pour assurer le respect des droits de la défense, de présenter des observations. Nous appelons de nos vœux qu’à l’occasion de la future instruction de l’administration fiscale à ses agents, annoncée dans le prolongement de la Circulaire, elle leur demande de transmettre systématiquement ces observations aux parquets, quelle que soit la procédure suivie.