La décision Kronos rendue par la CJUE le 11 septembre 2014 permet de délimiter précisément le champ d’application de la liberté d’établissement protégée par l’article 49 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
Par Daniel Gutmann, avocat associé, CMS Bureau Francis Lefebvre
Une société, constituée selon la législation de l’Etat du Delaware (siège statutaire), avait «sa direction» (selon les termes de l’arrêt) en Allemagne où elle disposait d’une succursale et était inscrite au registre du commerce. Elle détenait des participations dans diverses sociétés établies dans l’Union européenne. La société avait perçu des dividendes de ses filiales européennes qui avaient été exonérés en application des conventions fiscales, ce qui avait rendu impossible l’imputation sur ces dividendes de déficits en report chez la holding, alors que cette imputation était possible en application du droit allemand toutes les fois que les dividendes étaient de source allemande (en vertu d’un mécanisme d’inclusion des dividendes dans l’assiette imposable moyennant octroi d’un crédit d’impôt remboursable). Elle estimait donc que le traitement défavorable des dividendes de source étrangère qu’elle avait perçus portait atteinte tant à la liberté d’établissement qu’à la liberté de circulation des capitaux.
Il ressort de la décision que la société ne pouvait pas se prévaloir de la liberté d’établissement. En effet, les règles du traité en matière de liberté d’établissement ne s’appliquent qu’à un ressortissant d’un Etat membre de l’Union. Or, ne sont considérées comme «ressortissantes» d’un Etat membre que les sociétés constituées en conformité avec la législation d’un Etat membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement à...