La proposition de directive de la Commission visant à lutter contre la fraude fiscale comporte un chapitre consacré à l’exit tax. Son adoption en l’état conduirait à un renforcement notable de cette imposition.
Par Eric Ginter, avocat associé, chargé d’enseignement à Paris-Dauphine, et Eric Chartier, avocat counsel, Hoche Société d’Avocats
La proposition de directive que la Commission vient de transmettre au Conseil, et pour laquelle le Parlement européen se prépare à rendre un avis, entend, grâce à l’exit tax, lutter contre les pratiques des contribuables qui essaient «de réduire leur contribution fiscale en transférant leur résidence fiscale et/ou leurs actifs vers une juridiction à faible imposition».
«L’imposition à la sortie a [donc] pour objectif d’empêcher l’érosion de la base d’imposition dans l’Etat d’origine», notamment en cas de transfert d’actifs recélant des plus-values latentes.
La Commission entend ainsi proposer un système commun d’imposition reposant sur les principes dégagés par la jurisprudence de la CJUE1 et s’appliquant non seulement aux entreprises mais aussi aux personnes physiques.
Dans une telle situation, le choix laissé aux contribuables concernés serait assez simple puisqu’ils pourraient soit acquitter immédiatement l’impôt dû sur ces plus-values latentes, soit en étaler le paiement sur une période de cinq années.
Elle s’appliquerait en cas de transfert d’un établissement stable vers un autre Etat ou de transfert d’actifs entre établissements stables situés dans deux Etats différents, mais aussi en cas de transfert de résidence fiscale.
L’étalement du paiement de la taxe ne serait possible que dans l’hypothèse où ce transfert interviendrait au sein de l’UE ou de l’EEE, auquel cas l’Etat créancier aurait la possibilité de réclamer le paiement d’intérêts.
Cet étalement serait immédiatement suspendu et l’impôt dû en cas de cession des actifs ou de transfert de ceux-ci vers un Etat tiers.
L’imposition prévue par ce texte ne serait écartée que dans deux hypothèses :
– si les actifs restent taxables dans l’Etat d’origine en dépit du transfert opéré : on pense ici aux biens immobiliers ou à ceux qui leur sont assimilés ;
– ou si le transfert des actifs en cause revêt un caractère temporaire.
L’Etat d’accueil devra calculer ses propres impositions en tenant compte des plus-values qui auront été taxées dans l’Etat de départ.
Si elles étaient adoptées sans changement, et le Parlement européen n’en propose à ce stade aucun, ces dispositions seraient susceptibles d’entraver considérablement l’exercice de la liberté d’établissement au sein de l’Union, que ce soit pour les entreprises, principalement visées par ce texte, mais aussi pour les personnes physiques susceptibles de détenir des actifs recélant des plus-values latentes.