Le Conseil d’Etat vient d’accueillir positivement un recours pour excès de pouvoir contre un acte administratif dit «de droit mou». Toute la question est désormais de savoir si une telle opportunité est transposable à la matière fiscale.
Par Nicolas Jacquot, avocat associé, et Paul Mispelon, collaborateur doctorant, Arsene Taxand
L’adage «dura lex, sed lex» perdait depuis quelques années de sa pertinence avec la multiplication d’instruments juridiques dépourvus de force contraignante, qualifiées pour cette raison de «droit mou» ou de «droit souple». Ces normes si particulières, édictées par une autorité administrative, quand bien même elles pouvaient influencer le comportement des acteurs économiques, ne pouvaient être attaquées par le biais du recours pour excès de pouvoir. En effet, le juge considérait que leur caractère malléable n’entraînait aucune conséquence et ne faisait pas grief à d’éventuels requérants.
Le Conseil d’Etat vient peut-être de changer la donne par deux décisions de sa section du contentieux (CE, 21 mars 2016, n° 368082 et n° 390023), ce qui ne peut que susciter l’intérêt du fiscaliste qui doit faire face, lui aussi, à la multiplication du droit mou dans sa matière.
Depuis quelques années maintenant, l’administration fiscale multiplie ses communications et prises de position en dehors de sa base doctrinale habituelle (la base BOFiP) : carte des pratiques et montages fiscaux jugés «abusifs», guides pratiques, communications sur internet, foires aux questions, communiqués et dossiers de presse, etc.
Dans ses décisions du 21 mars dernier, le Conseil d’Etat a jugé qu’un communiqué de presse d’une autorité administrative indépendante pouvait faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir sans que cet acte ne fasse grief au requérant. Il pose néanmoins comme condition que le requérant...