Evénement

Innovation for finance 2025

Publié le 23 mai 2025 à 14h00

Anne del Pozo    Temps de lecture 15 minutes

Option Finance a organisé le 29 avril dernier Innovation for Finance, un événement réunissant dirigeants et directeurs financiers d’entreprises, de banques et de fintechs Un événement alternant plénières, ateliers et temps de networking, permettant d’échanger entre pairs ou avec des experts sur les sujets de gestion des risques, de transformation digitale de la fonction finance et de RSE.

Digitaliser la fonction finance pour accélérer et gagner en efficacité

La digitalisation de la fonction finance est en ordre de marche dans de nombreuses entreprises. « Chez Danone, l’équipe transformation digitale de la finance est notamment en charge d’un projet de mise en place d’EPM et d’un projet de visualisation des données reportées via Snowflake et Power Bi, afin notamment de réaliser des analyses plus approfondies et plus rapides pour l’ensemble de nos filiales, explique Delphine Rabatel, finance digital transformation director, Danone. Aujourd’hui, nos utilisateurs ont déjà gagné en efficacité et l’accès aux datas est facilité. » Au sein des Laboratoires Majorelle, le système d’information embarquait différents logiciels métiers sans aucune passerelle entre eux. « Tout l’enjeu consistait à comprendre les données des différents métiers et à les centraliser, explique Guillaume de Pommereau, directeur financier, Laboratoires Majorelle. Nous avons mis en place une base de données SQL pour tous les métiers et la solution Power BI. Un an et demi après sa mise en place, financiers et non-financiers utilisent la solution. Nous avons gagné en temps, en efficacité et en transparence sur les données. »

DAF et DSI travaillent de concert

« La digitalisation de la finance nous amène à travailler davantage avec la DSI et à monter en compétences sur les nouvelles technologies », précise Delphine Rabatel. « Les DAF sont en effet de plus en plus orientés système d’information et datas, ajoute Frédéric Lumeau, associé, BDO. Ils s’interrogent sur les outils à mettre en place pour se digitaliser et gagner en productivité, mais aussi pour accélérer la production de data, les structurer et les restituer. » « Le rôle de la DAF s’oriente davantage vers des sujets technologiques, constate pour sa part Christophe Adam, product marketing manager, Sage. Ils nous interrogent par exemple davantage sur la connexion des solutions entre elles via des API, ou la sécurité des données hébergées dans le cloud. » « Il y a également un vrai enjeu aujourd’hui pour les directions financières d’avoir de la donnée propre et exploitable », ajoute Thibaut Dulac, CPM business unit director, Talentia. La démarche est d’autant plus importante avec l’IA.

L’IA accélérateur de performance ?

« En effet, l’IA générative devrait aussi permettre à la finance de gagner en productivité, ajoute Frédéric Lumeau. Elle peut par exemple les aider dans leurs choix de solutions. » « On avait déjà de l’IA sur des contrôles de données, de l’intégration, de la dématérialisation de factures, etc., qui s’appuie sur de la donnée de l’entreprise, précise Christophe Adam. Avec ChatGPT, nous avons un assistant qui vient s’intégrer dans l’ensemble de nos solutions et qui permet de poser des questions de manière relativement simple. Aujourd’hui, les éditeurs travaillent sur des algorithmes intelligents qui pourront apporter de la valeur, par exemple, sur l’élaboration budgétaire, l’optimisation des approvisionnements, etc. » « L’étape ultime sera l’analyse prédictive, ajoute Thibaut Dulac. La question est de savoir comment y parvenir de manière éthique et sécurisée. » « Chez Danone, nous travaillons pour le moment sur un chatbot “Talk to my document” pour trouver plus facilement des documents, indique Delphine Rabatel. Nous sommes également sur un PoC « talk to data » qui nous permettra d’aller récupérer des données. » « L’un de nos objectifs consiste à intégrer des données externes, souligne pour sa part Guillaume de Pommereau. Le jour où nous aurons nos données internes et externes de vente, alors nous pourrons faire des modèles de prévision un peu plus fiables. » 

EDF réunit la finance et la RSE au sein d’une direction à impact

Xavier Girre, directeur exécutif groupe en charge de la direction de la performance impact investissement finance d’EDF

Le prix de l’électricité est un enjeu critique pour EDF car, alors même que nous ne le maîtrisons pas, nous devons être compétitifs, soutenables financièrement et le meilleur industriel possible. A cet effet, nous devons mettre en place des outils de pilotage avec des tableaux de bord par métier, et des processus de gestion permettant d’optimiser nos coûts et nos allocations d’investissements. Notre vision doit s’inscrire dans le long terme car notre passif nucléaire se déploie sur des centaines d’années. Les critères en termes de création de valeur et de rentabilité sont identiques aux projets que nous menons dans d’autres énergies renouvelables. Chez EDF, cette création de valeur porte aussi sur des critères RSE. Notre performance est certes financière mais doit aussi être sociale et environnementale. Une stratégie qui nous amène à optimiser tous nos process de reporting sur les datas non financières et à renforcer la prise en compte de ces objectifs en matière de RSE dans tous nos processus de décision.

Loi Omnibus et CSRD : quelles perspectives pour les entreprises ?

La Corporate Sustainability Reporting Directive (CSRD), entrée en vigueur en 2024, impose aux entreprises européennes de rendre compte de leurs performances ESG de manière plus transparente et détaillée. Une directive que la Commission européenne entend alléger et reporter au travers de la directive « Omnibus ».

« Pour la mise en place de son projet CSRD initié en 2024, Terega s’est fait accompagner par un cabinet de conseil, ses auditeurs et son comex, témoigne Agnès Butterlin, ex-CFO Newcleo et ex-CFO Terega. Sur le fond, la double matérialité nous a permis de comprendre l’impact de nos activités sur l’environnement et le fait que l’évolution de l’environnement présente des risques financiers pour l’entreprise. Enfin, la CSRD permet de se poser des questions sur la chaîne de valeur. » « Chez Synergie, le projet CSRD s’est inscrit dans une vision stratégique dès le début, explique Yannick Ouvrard, DAF Groupe de Synergie. Même si nous avions déjà des fondamentaux solides en matière de RSE, nous nous sommes quand même fait accompagner et avons priorisé les indicateurs sur lesquels nous souhaitions publier. » « La double matérialité n’est pas un sujet simple et le conseil de spécialistes est souvent indispensable à sa mise en œuvre », ajoute Frédéric Mercier, EMEA principal value manager, Jedox France.

La simplification en cours

Le projet Omnibus qui vise à simplifier la CSRD s’articule autour de directives : le dispositif « Stop the clock » (report de deux ans pour les vagues 2 et 3 en attendant le relèvement des seuils) et le « Content » pour gérer les autres changements (scope, normes, assurance...). « Les limites planétaires de ressources restent inchangées, souligne Agnès Butterlin. Cette évolution réglementaire ne doit donc pas être un renoncement. » « Elle va cependant nous permettre de gagner du temps et de l’expérience, ajoute Yannick Ouvrard. Mais cela veut dire qu’il faut se préparer, car il s’agit d’une refonte complète des process. » « Avec Stop the clock, on garde le même objectif, mais on le ramène sur une réalité concrète au quotidien du business de l’entreprise », précise Frédéric Mercier. « Il y a un vrai sujet de stabilité et de prévisibilité, poursuit Agnès Butterlin. Cette notion de stabilité est importante parce qu’on a besoin, en tant qu’entreprise, d’avoir un lot de normes qui ne bougent pas dans le temps et qui nous permettent de nous préparer. Il est aussi important d’avoir des standards simples et le moins interprétables possible. »

Quelles perspectives sur les normes ?

« Avec les nouvelles directives, on va avoir des trajectoires, des objectifs, poursuit Yannick Ouvrard. Lorsqu’il y a un changement réglementaire, donnons du temps au temps pour que le marché s’adapte aussi. » « Les deux années supplémentaires vont également permettre de travailler sur la fiabilisation des données RSE, conclut Agnès Butterlin. C’est également l’occasion de se poser la question de l’outil qui accompagnera l’entreprise dans sa mise en conformité avec cette réglementation. » 

Révolution de la facturation électronique : une opportunité pour les entreprises

« Une facture électronique est une facture qui a été créée, émise et reçue sous forme électronique, rappelle Cyrille Sautereau, président du Forum national de la facture électronique. Dans le cadre de la réforme, elle devra contenir les mentions obligatoires sous forme électronique structurée. Grâce à un annuaire centralisé des adresses de réception, les factures pourront être envoyées de manière standardisée, traçable et opposable. Ces échanges transiteront par des plateformes de dématérialisation partenaires (PDP) qui garantiront la sécurité des échanges et transmettront à l’administration fiscale les mentions obligatoires, afin qu’elle puisse faire du contrôle et du préremplissage (de TVA) et repérer les signaux faibles. Ce volet de la réforme concerne toutes les entreprises françaises assujetties à la TVA. Pour celles qui opèrent en b-to-c ou en b-to-b international, elles seront soumises au volet e-reporting de la réforme. »

A l’origine, le système de facturation électronique reposait sur un modèle hybride combinant un portail public de facturation (PPF) avec des fonctions régaliennes (annuaire, collecte des données fiscales) et des plateformes privées (PDP) pour l’échange entre entreprises. A l’automne dernier, le gouvernement a renoncé à faire du PPF une plateforme de dématérialisation pour les entreprises, au profit du marché privé, jugé plus agile, moins coûteux et mieux adapté aux besoins. « L’Etat se recentre sur ses fonctions essentielles : garantir l’interopérabilité via le réseau Peppol et coordonner la normalisation des échanges grâce à la commission Afnor, précise Cyrille Sautereau. Celle-ci travaille sur la standardisation des formats, des cas d’usage et des API pour assurer la portabilité entre PDP, tout en gardant l’adresse de réception des factures stable via le numéro Siren. »

Quels facteurs clés pour réussir sa mise en conformité ?

« Cette réforme est certes légitime mais elle dépasse le seul cadre fiscal, indique pour sa part Raphaël de la Guéronnière, directeur du programme facturation électronique, Orange. Elle change en profondeur l’organisation des entreprises, oblige à repenser toute la chaîne de facturation. La réussite d’un projet de facturation électronique en entreprise repose donc sur un investissement fort en interne pour cartographier les processus de facturation et mettre à jour des données clés comme les Siren clients, sur une collaboration anticipée avec les plateformes (PDP) pour intégrer efficacement les échanges, et sur l’acceptation des incertitudes qui entourent encore cette réforme. » « D’un point de vue technique, le passage à la facturation électronique nécessite de réaliser une analyse approfondie des cas d’usage, une mise en conformité technique des systèmes et leur interfaçage avec la PDP, une gestion rigoureuse de l’annuaire et des échanges clients-fournisseurs, une capacité à gérer et suivre le cycle de vie des factures, ainsi qu’une approche harmonisée à l’international pour les entreprises présentes dans plusieurs pays », ajoute de son côté Rachid Ouzmine, consultant avant-vente EDI/e-invoicing, Comarch. Au-delà de la réponse aux problèmes de fraude, la facturation électronique est ainsi le prolongement du processus de digitalisation de nos entreprises. 

Cybersécurité, comment se prémunir face aux cyberattaques et aux fraudes ?

La cybercriminalité recouvre l’ensemble des délits et crimes commis à l’encontre ou par le biais des systèmes d’information. Dans la finance, elle peut se concrétiser par de la fraude aux virements, au président ou encore aux fournisseurs, de l’escroquerie à la carte bancaire, de faux investissements, de faux conseillers bancaires, du rançongiciel, etc. « Avec l’intelligence artificielle et les réseaux sociaux, les risques de fraude tendent à se renforcer », précise Benoît Fuzeau, président du CLUSIF.

« Dans mon entreprise, nous avons été victimes de deux tentatives de fraude au président, qui ont été déjouées grâce à une sensibilisation de nos équipes aux risques, à une prise de conscience précoce et à la vigilance de notre comptable, témoigne ainsi Sylvie Salinie, présidente, Agiscom Groupe & Vice-Présidente, CCI Seine-et-Marne. Quand on est chef d’entreprise d’une PME, la cybersécurité n’est pas forcément la priorité. Certaines choses avaient été faites, notamment en termes de communication, mais depuis ces tentatives de fraude, nous sommes allés plus loin en termes de prévention du risque cyber. »

Sensibiliser et mettre en place des bonnes pratiques

« En cas d’attaque cyber, le maillon faible est plus souvent l’humain que la technologie, indique pour sa part Nicolas Dauffy, product marketing manager, Cegid. Il est donc important de diffuser la culture de la sécurité auprès des collaborateurs. Certains processus simples peuvent également être mis en place pour éviter la fraude comme la ségrégation des tâches dans la chaîne de paiement et les workflows de validation, ou le fait de s’appuyer sur des outils de gestion de trésorerie qui autorisent des connexions seulement sur certaines adresses IP ou qui ne permettent pas les paiements via des connexions extérieures. D’autres outils permettent de vérifier la conformité de l’IBAN avec le nom de la société… L’Europe a également pris des décisions notamment avec la DSP2 qui oblige la double authentification, ou la VOP qui obligera les banques, fin 2025, à vérifier la conformité de l’IBAN pour le paiement et les virements immédiats. Enfin, l’IA se développe aussi beaucoup pour la lutte contre la fraude. » « La directive NIS 2 devrait également aider les entreprises à mieux se prémunir contre les risques cyber, insiste Benoît Fuzeau. Elle s’articule autour de quatre piliers : la mise en place d’une gouvernance en cybersécurité, la déclaration auprès de l’ANSSI de tous les incidents significatifs, cyber ou informatiques, la formation des collaborateurs sur le sujet et la maîtrise des tiers avec lesquels travaille l’entreprise. » « Il faut également capitaliser sur les fraudes qui se sont déjà produites dans l’entreprise pour mettre en place des bonnes pratiques afin qu’elles ne se renouvellent pas », conclut Sylvie Salinie. 

Penser au-delà de la performance financière

La performance extra-financière est très transversale. « Chez Essendi, nous avons pour volonté d’intégrer l’ESG dans la stratégie du groupe, explique Laetitia Lepaisant, sa VP group controller. Nous avons donc mis en place une organisation et structuré notre projet. La direction du développement durable a apporté son expertise sur toutes ces normes et réglementations. La finance, de son côté, a mis au service de ce projet toute sa capacité à remonter de la donnée, à la structurer, à la fiabiliser. Notre experte data a pour sa part amené beaucoup de liant entre cette rigueur financière, l’expertise, la connaissance des sujets ESG, CSRD, taxonomie, la double matérialité et la partie data. » « La CSRD est un projet qui peut être lourd et complexe, souligne Grégory Schrobiltgen, spécialiste ESG et ancien CFO de Mazars et de Valgo Groupe. Attaquer ce sujet nécessite de s’y plonger, d’aller voir des spécialistes, de bien comprendre ce qu’on produit, d’assurer la qualité de la donnée. » « Cela va même au-delà de la donnée, précise Valérie Labouré-Hirsch, associate partner, Meaneo, et ancienne directrice financière, Aramis Group. Il faut identifier les enjeux, les risques et les opportunités de son entreprise et de ses partenaires business. Il faut ensuite choisir ses enjeux les plus importants pour les approfondir et les prioriser. La démarche CSRD conduit à choisir et enclencher les transformations les plus importantes pour l’entreprise. » « La CSRD, bien qu’exigeante et complexe, met en lumière l’importance centrale de la fiabilité des données, et favorise un rapprochement entre les expertises finance et reporting et les compétences RSE au sein des entreprises », poursuit Laure Razat, directrice des solutions ESG, K-Shuttle.

Un DAF en mutation

« La mission première du directeur financier ne change pas, souligne Valérie Labouré-Hirsch. En revanche, ce qui change, c’est le contexte. Longtemps, il est resté fiable et les financiers sont allés chercher la performance sur tous les leviers de l’entreprise. Aujourd’hui, le CFO est responsable d’assurer une adaptabilité de l’entreprise par rapport aux événements. Le DAF était déjà bien placé pour avoir une vision transverse. Avec la CSRD, il augmente encore sa largeur de vue. » « Au-delà des outils et des données, il faut aussi avoir prévu un certain nombre de scénarios et donc avoir cartographié les risques pour mieux les anticiper », ajoute Grégory Schrobiltgen. « Le CFO doit aussi faire en sorte que la société reste rentable pour ses actionnaires et pour les banques qui apportent les financements, ajoute Laetitia Lepaisant. Au-delà des données financières, nous intégrons aussi des critères ESG dans nos décisions d’investissements. » « Il est également important qu’il y ait autour du DAF et de la fonction RSE un relais très opérationnel », poursuit pour sa part Laure Razat. Longtemps garant de la performance financière, le DAF doit aujourd’hui veiller à la robustesse de l’entreprise, tout en y intégrant la notion de durabilité.

Merci à nos partenaires

Merci à nos modérateurs : Jean-Pierre Godbillon, Finance Transformation Director, Nordkapp Consulting ; Susanne Liepmann, Présidente, Fiplus et SLN Consulting ; Julien Achard, CEO, OpenbanQ ; Olivier Vigna, Délégué général adjoint, Paris Europlace ; Marc Vincent, Professeur associé, Université Paris-Dauphine-PSL.

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