Il est intéressant de s’interroger sur les pratiques de valorisation au-delà des frontières françaises.
Par Julien Saïac, avocat associé en fiscalité internationale. Il traite plus particulièrement des questions relatives aux restructurations internationales et aux investissements immobiliers. julien.saiac@cms-bfl.com
Nous avons donc demandé à quatre avocats spécialistes de l’immobilier dans des cabinets membres de CMS de répondre de façon synthétique aux questions suivantes portant sur l’évaluation des immeubles dans leur juridiction respective (Royaume-Uni, Italie, Espagne et Allemagne) : y a-t-il une méthode de valorisation obligatoire ou privilégiée par les autorités fiscales de votre pays ? Si ce n’est pas le cas, quelle est la méthode généralement retenue par les praticiens ? Existe-t-il des différences en fonction des impôts considérés ?
Dans chacun des pays étudiés, il n’existe pas de règle générale applicable à tous les impôts et qui serait obligatoire pour déterminer la valeur d’un immeuble.
Au Royaume-Uni, la valeur vénale se définit comme le prix auquel le vendeur peut raisonnablement s’attendre en cas de mise en vente sur le marché. Cette définition s’applique à l’impôt sur les sociétés, à l’impôt sur les plus-values des particuliers et aux droits d’enregistrement. En règle générale, les autorités fiscales britanniques accepteront de considérer le prix pratiqué entre parties indépendantes comme un prix de marché. L’autorité britannique de régulation des géomètres («RICS») publie régulièrement un «livre rouge» sur la valorisation des immeubles, présentant différents principes de valorisation des actifs immobiliers, qui bien que ne présentant aucun caractère obligatoire est couramment utilisé.
Par ailleurs, les autorités fiscales anglaises peuvent solliciter l’avis d’une agence gouvernementale spécialisée dans l’évaluation immobilière (Valuation Office Agency).
En Italie, pour les besoins de l’impôt sur le revenu, la règle générale consiste également à se référer à la valeur vénale du bien. Cette valeur est déterminée par application de la méthode du prix comparable sur le marché libre (ou méthode «CUP»). Il est d’usage de se référer à une base de données gérée par l’administration fiscale italienne, qui inclut pour chaque type de bien (résidentiel, bureaux, commercial, industriel), pour chaque période (semestre) et pour chaque périmètre (quartier, zone) le prix minimum et le prix maximum pratiqués dans le cadre des ventes immobilières (toutes déclarées auprès des autorités fiscales italiennes). Il est généralement admis de retenir une valeur moyenne mais l’état du bien (neuf, ancien, rénové) ainsi que ses spécificités peuvent conduire à se rapprocher du prix minimum ou du prix maximum.
En ce qui concerne les droits d’enregistrement, les droits de donation, de succession et les taxes locales, la situation est différente car l’imposition n’est pas établie sur la base de la valeur vénale mais sur la valeur cadastrale, cette dernière valeur étant déterminée en capitalisant un revenu théorique sur un certain nombre d’années.
En Espagne, il convient en général de se référer à la valeur vénale, qui est généralement déterminée à dires d’expert. Toutefois, certaines taxes locales sur le transfert de terrains sont déterminées à partir de la valeur cadastrale et de la durée de détention. Par ailleurs, pour les droits d’enregistrement, les autorités fiscales des différentes régions autonomes publient des évaluations immobilières. Toutefois, si les parties sont en mesure de justifier d’une valeur vénale différente, cette dernière valeur est généralement acceptée.
Enfin, en Allemagne, il est également fait référence à la valeur de marché pour l’impôt sur le revenu. En ce qui concerne les droits d’enregistrement, une valeur fiscale spécifique égale à 12,5 fois le loyer annuel net (minorée d’abattements en fonction de l’ancienneté du bien) est utilisée en l’absence de versement d’un prix. Une valeur standard fondée sur des évaluations de 1964 est par ailleurs utilisée pour la taxe foncière.
Nous remercions Richard Croker (CMS Cameron McKenna, Royaume Uni), Giovanni Cali (CMS Adonnino Ascoli & Cavasola Scamoni, Italie), Victor Hernán (CMS Albiñana & Suárez de Lezo, Espagne) et Thomas Link (CMS Hasche Sigle, Allemagne) pour leur contribution à cet article.