Mis en place par la loi de finances rectificative pour 2016 (loi 2016-1918 du 29/12/2016) et à destination des entrepreneurs et des business angels, le compte PME innovation pourra ne pas satisfaire totalement ces derniers.
Par Georges Morisson-Couderc, avocat associé, PwC Société d’Avocats et Sophie Poma-Sokcevic, avocat, PwC Société d’Avocats
Destiné, notamment, à encourager les investisseurs privés à financer des start-ups, le compte PME innovation leur offre la possibilité de bénéficier d’un report d’imposition de la plus-value éventuellement tirée de la cession des titres ou des parts de sociétés éligibles, en cas de réinvestissement de ce gain.
Venant s’ajouter aux différents dispositifs fiscaux de faveur déjà en place, que ce soit à l’entrée dans la société (réduction d’impôt sur le revenu ou réduction d’impôt de solidarité sur la fortune) ou à la sortie (investissement à travers un PEA ou un PEA-PME), le compte PME innovation peut-il s’en démarquer ?
Tout contribuable fiscal français peut détenir un compte PME innovation. L’ouverture se fait auprès d’un établissement de crédit, de la Caisse des dépôts et consignations, de la Banque de France ou encore d’une entreprise d’investissement.
Les conditions d’accès à ce véhicule sont, en revanche, assez contraignantes : initialement réservé aux investisseurs actionnaires à hauteur de 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société cédée, l’entrée dans le compte PME innovation a été ouverte aux investisseurs signataires d’un pacte d’actionnaires ou d’associés personnes physiques portant sur au moins 25 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société (chaque signataire devant détenir au minimum 1 % des droits précités et au moins l’un d’entre eux devant exercer dans la société une fonction de direction). Par ailleurs, le compte PME innovation est également accessible aux salariés ou dirigeants possédant au moins 10 % de leur société.
L’alimentation du compte PME innovation se fait par l’inscription sur le compte-titres, de parts ou actions de sociétés que le titulaire du compte a acquises ou souscrites en dehors de ce compte et qu’il envisage de céder. Cependant, au titre de la première année d’application, le compte PME innovation pourra être alimenté par des liquidités issues de la cession ou du rachat de titres intervenus depuis le 1er janvier 2016 lorsque le titulaire du compte remplissait à la date de la cession ou du rachat les conditions permettant d’ouvrir un compte PME innovation.
Sous réserve que les sommes figurant sur le compte-espèces soient réinvesties dans un délai de vingt-quatre mois à compter de la date de l’opération (cession, rachat ou dissolution), le titulaire du compte bénéficie d’un report d’imposition des plus-values jusqu’à la sortie des liquidités du compte avec la possibilité de compenser les plus et moins-values. Ce report est sans limite de durée et sans plafond contrairement au PEA. En revanche, le report ne concerne que l’impôt sur le revenu, les prélèvements sociaux restent dus au titre de l’année de réalisation des plus-values.
Le réinvestissement des fonds doit être réalisé dans des jeunes PME (de moins de sept ans), des PME innovantes (de moins de dix ans) ou des fonds d’investissement (FCPR, FPCI, SLP SCR). Au-delà de l’aspect financier, l’objectif du compte PME innovation est d’associer durablement les investisseurs à la vie des entreprises éligibles. En revanche, les liquidités figurant sur le compte-espèces ne peuvent pas être employées, notamment, à la souscription de titres dans le cadre des dispositifs d’options de souscription d’actions, ou de bons de souscription de créateurs d’entreprises.
Le compte PME innovation n’est pas clôturé automatiquement lorsque le titulaire procède à des retraits de liquidités ou de titres. Au retrait, le gain net est soumis à l’impôt sur le revenu, après application de l’abattement pour durée de détention le cas échéant.
Les dividendes générés par les titres inscrits en compte sont assujettis annuellement à l’impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux. Ainsi, l’investissement à travers un PEA ou un PEA-PME reste plus compétitif à cet égard.
Réclamée notamment par les business angels et initialement envisagée, l’exonération temporaire d’ISF des liquidités et des titres déposés sur le compte PME innovation n’a pas été retenue. Les entrepreneurs et les investisseurs devront donc continuer à se satisfaire des dispositifs existants, sous réserve que ceux-ci puissent être cumulés avec le compte PME innovation, afin de limiter leur charge d’impôt.
Les entrepreneurs et les business angels apprécieront l’absence de plafond du compte PME innovation ainsi que la possibilité de profiter facilement d’un report d’imposition des plus-values mais regretteront la complexité des conditions à remplir et l’absence de dispositif fiscal de faveur au titre de l’ISF.