Parole d’expert - Jean-Pierre Gomez, responsable des affaires publiques et réglementaires, Société Générale Securities Services Luxembourg

Adoption des RTS SFDR par la Commission

Publié le 29 avril 2022 à 10h49

SGSS    Temps de lecture 4 minutes

La Commission européenne a annoncé mercredi 6 avril 2022 avoir adopté les normes techniques de réglementation (RTS) à utiliser par les acteurs des marchés financiers au moment de la diffusion d’informations relatives à la durabilité, dans le cadre de ce règlement (UE) 2019/2088 du 27 novembre 2019 dit « SFDR » (Sustainable Finance Disclosure Regulation).

Jean-Pierre Gomez, responsable des affaires publiques et réglementaires, Société Générale Securities Services Luxembourg

Les RTS entérinés comprennent :

• le texte majeur de l’acte délégué avec l’ensemble des 13 RTS, accompagné d’un exposé des motifs ; 

• Annexe 1 – Modèle de déclaration des principales incidences négatives sur la durabilité ; 

• Annexe 2 et 3 – Modèle d’informations précontractuelles pour les produits financiers (y compris les OPCVM et les FIA) visés aux articles 8 et 9 de SFDR ; 

• Annexe 4 et 5 – Modèle d’informations périodiques pour les produits financiers (y compris les OPCVM et les FIA) visés aux articles 8 et 9 de SFDR. 

Les RTS doivent à présent être soumis à un examen minutieux du Parlement européen et du Conseil. Une fois le texte final approuvé, les RTS seront publiés au Journal officiel de l’UE.

Comme nous avons pu le constater, la date d’application des RTS a été sujette à de nombreux reports. 

Ces RTS validés prévoient une application à partir du 1er janvier 2023. On s’attend donc à ce que le 1er janvier 2023 soit bien la date effective. Toutefois cette date d’entrée en vigueur ne sera pas définitive aussi longtemps qu’elle n’est pas confirmée par le Parlement européen et le Conseil.

La version des RTS validée par la Commission reste conforme au projet de texte publié par les ESAs le 22 octobre 2021. Les interrogations des acteurs financiers exprimées par la voix de leurs associations de place n’ont pas eu de réel impact pour modifier le texte final des RTS du mois d’octobre dernier. Pour autant, le défi reste le même pour les sociétés de gestion et/ou gérants d’actifs d’OPC : produire en 2023 les informations chiffrées demandées par SFDR. Il y a l’OPC ayant une classification verte (art. 8 de SFDR) considérant les critères ESG dans sa stratégie d’investissement et celui ayant choisi une classification vert foncé (art. 9 de SFDR) avec un objectif d’investissement durable.

A l’exception des gérants d’actifs ayant acquis depuis plusieurs années une expertise et des outils pour les investissements durables, cela risque d’être plus compliqué tant pour les acteurs des marchés financiers que pour nos autorités de surveillance nationales ou européennes. Les données vertes, avec une information sur le critère S de ESG, font encore défaut et gênent les calculs (KPIs ou indicateurs dits « PAI » – Principal Adverse Impacts). Il n’y a toujours pas de définition universelle de la durabilité. Certains gérants préfèrent se tourner vers une solution de bricolage interne de reporting en attendant plus de transparence sur le marché des données et des méthodes d’évaluation.

Les chiffres d’une étude Morningstar de septembre 2021 semblaient dire que près de 80 % de l’industrie des OPC était classée article 6 de SFDR, donc non soumise au reporting SFDR. A ce jour, ni la CSSF ni l’AMF n’ont communiqué la liste des OPC ayant mentionné une classification verte dans leur prospectus qui est une obligation réglementaire applicable depuis le 10 mars 2021. 

Ce chiffre a sensiblement changé. Environ 34 % des OPC seraient classés au moins article 8 de SFDR. Sans doute que la complexité ou la diversité des règlements verts à interpréter (SFDR, règlement Taxonomie, CSRD, loi Climat ou TCFD) et le coût du reporting SFDR, peuvent constituer un frein pour les entreprises à envisager une stratégie verte pour leurs OPC. 

D’autre part, les méthodologies d’évaluation et d’interprétation des critères dits ESG étant diverses et variées, les autorités de surveillance peuvent avoir des difficultés à contrôler des OPC ayant la même classification mais produisant des chiffres différents, rendant impossible toute comparaison entre ces OPC. 

Les produits financiers ont maintenant cette obligation d’être répertoriés en vert ou pas vert du tout. Quelle est donc la légitimité des labels ESG pour qualifier un produit financier ? Y a-t-il encore une utilité à obtenir et publier ces labels ?

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