Nés dans le giron des équipes comptabilité et finance, les métiers de l’audit et du contrôle internes ont ces dernières années vu leur champ d’action s’élargir. Une tendance portée par l’évolution des risques auxquels les entreprises sont confrontées, et qui fait émerger des auditeurs et contrôleurs internes de plus en plus spécialisés.
Les missions des auditeurs et contrôleurs internes visent toutes à s’assurer que les objectifs d’une organisation soient bien atteints et que, pour ce faire, les risques soient bien maîtrisés. Ces missions sont exercées à plusieurs niveaux. « Le contrôleur interne définit les dispositifs de contrôle permanent qui vont permettre aux opérationnels de l’organisation de s’assurer que leurs objectifs sont atteints », explique Philippe Mocquard, délégué général de l’Institut français de l’audit et du contrôle internes (IFACI). Il lui revient à ce titre d’identifier les points de contrôle à mettre en place dans l’entreprise, les réglementations auxquelles elle doit se conformer et de construire les processus de contrôle et leur récurrence en fonction de la cartographie des risques. « Le contrôleur interne peut par exemple proposer de nouveaux dispositifs de contrôle lorsque des dysfonctionnements sont constatés dans les processus », précise Olivia Jacob, senior manager en charge des équipes finance et immobilier chez Robert Walters. Il peut également être recruté pour créer ces dispositifs de bout en bout.
« L’auditeur interne pour sa part a pour vocation de vérifier, de façon ponctuelle, définie dans le cadre d’un plan d’audit, que le dispositif de contrôle interne fonctionne bien », poursuit Philippe Mocquard. Il va alors s’assurer de l’exactitude et de la cohérence des informations, identifier les éventuels écarts, pointer les zones d’erreurs et proposer des corrections, en particulier sur les processus présentant un risque majeur. « Par exemple, les auditeurs internes qui opèrent dans une entreprise du retail vont ainsi se rendre dans les points de vente pour s’assurer de la bonne gestion des stocks et du cash, ceux dans une entreprise industrielle se rendront sur les sites de production afin de s’assurer du bon déroulement des process mis en place », ajoute Olivia Jacob.
Une évolution des risques qui influe sur la profession
Dans un cas comme dans l’autre, les missions du contrôle et de l’audit internes sont liées aux risques auxquels les entreprises sont exposées. « Pour porter l’effort au bon endroit, il est nécessaire de déterminer les risques les plus importants pouvant mettre en cause l’atteinte des objectifs de l’organisation, de les prioriser et d’isoler ceux qui doivent faire l’objet d’un contrôle », indique Philippe Mocquard. Ces risques dépendent de l’activité de l’entreprise et des obligations réglementaires auxquelles elle est soumise. Cependant, les grandes natures de risques sont sensiblement les mêmes pour toutes les entreprises et s’articulent autour de la finance certes, mais aussi et de plus en plus autour des risques cyber, digitaux, sociaux et environnementaux. C’est d’ailleurs en substance l’émergence et le développement de ces nouveaux risques qui, ces dernières années, a fait évoluer les métiers de l’audit et du contrôle internes. « C’est tout particulièrement le cas cette année avec l’arrivée de la CSRD, ajoute Philippe Mocquard. Nos métiers passent à un périmètre plus large, avec notamment des éléments environnementaux, sociétaux et de gouvernance. »
«Nos métiers passent à un périmètre plus large, avec notamment les questions environnementales, sociétales et de gouvernance»
Des compétences techniques qui se diversifient
Pour mener à bien leurs missions, auditeurs et contrôleurs internes doivent en premier lieu avoir un bagage technique financier important et une bonne lecture bilancielle. « Ils sont d’ailleurs souvent issus d’une formation en finance ou expertise comptable (DSCG, comptabilité, conseil et audit…), explique Léonie Marmas, consultante principale division senior finance chez Hays. Généralement, ils débutent ensuite leur parcours professionnel par de l’audit externe, en cabinet. »
En entreprise, les auditeurs et les contrôleurs internes en entreprise sont aussi attendus sur leur capacité à comprendre les risques auxquels l’entreprise est exposée pour bien les cartographier. A ce sujet, leurs compétences techniques vont ainsi, de plus en plus souvent, au-delà de la finance et peuvent également s’articuler autour de la RSE, de la conformité, des ressources humaines, du juridique, de l’IT et des métiers de l’entreprise. Ces compétences spécifiques sont d’ailleurs souvent des éléments différenciants pour les recruteurs. « Parfois, les auditeurs internes sont recrutés auprès des équipes métiers de l’entreprise, constate Philippe Mocquard. Ces derniers peuvent d’ailleurs être recrutés pour des missions spécifiques et limitées dans le temps, moyennant un certain nombre de précautions en termes de conflits d’intérêts, de confidentialité et de méthodes notamment. »
Un métier de communicants
S’il requiert des compétences techniques approfondies, le métier de contrôleur ou d’auditeur interne nécessite également une certaine capacité à travailler en équipe. Les capacités de communication sont indispensables pour échanger avec les opérationnels et connaître les processus en place sur le terrain. « Il s’agit de métiers de contact, poursuit Léonie Marmas. Le contrôleur interne doit par exemple être proche du terrain et savoir parler aux opérationnels, aller chercher l’information à la source. Ces métiers requièrent également rigueur, curiosité, organisation et précision. »
Pour leur part, les auditeurs internes doivent avoir un esprit de synthèse et d’analyse. « Afin d’intégrer les résultats de son audit dans un rapport qui fait sens, il est important que l’auditeur interne sache prendre du recul et qu’il ait une très bonne culture et connaissance de l’entreprise et de son organisation, de ses risques et de ses objectifs » explique Philippe Mocquard.
«Les métiers de l’audit et du contrôle internes sont des pépinières de talents et offrent des perspectives d’évolution attractives »
Un marché en tension
Au regard de ces différentes expertises, qui pour certaines tendent à se renforcer au regard notamment de la réglementation, les candidats deviennent difficiles à recruter. « Les entreprises recherchent de plus en plus de compétences très spécifiques, par exemple sur la compliance, le légal ou les M&A, qui sont assez rares sur le marché, précise Olivia Jacob. Par ailleurs, de par ses missions, l’auditeur interne peut être amené à beaucoup se déplacer. Certains et en particulier ceux qui travaillent dans les entreprises du CAC 40 passent 30 à 40 % de leur temps en déplacement, voire à l’étranger. Or, ils sont de plus en plus nombreux à être réticents sur ces déplacements et à se tourner plutôt vers des postes de contrôleur de gestion ou de contrôleur financier, au siège. C’est encore plus vrai depuis la période Covid. » Pour attirer ces profils d’auditeurs, les entreprises mettent de plus en plus en avant l’équipe au sein de laquelle ils vont travailler. « Comme ces déplacements se font généralement en équipe, les entreprises valorisent la proximité avec les opérationnels terrain et présentent très vite, lors du processus de recrutement, les collaborateurs avec lesquels ils seront amenés à travailler », poursuit Olivia Jacob. L’attractivité d’un poste dépendra ensuite des projets mis ou à mettre en place dans l’entreprise, mais aussi de la qualité de vie au travail proposée par l’entreprise, dont les jours de télétravail. Enfin, les entreprises misent également sur les salaires proposés. Selon Hays, le salaire d’un jeune auditeur ou contrôleur interne ayant une première expérience en cabinet est généralement compris entre 45 000 € et 50 000 € par an, et peut atteindre 60 000 à 70 000 € dès cinq à sept ans d’expérience et avec un bon niveau d’anglais.
Des perspectives d’évolution attractives
L’audit externe dans un grand cabinet est souvent un prérequis pour occuper ensuite des postes d’audit ou de contrôle interne en entreprise. Dès lors qu’ils intègrent le monde de l’entreprise, ces fonctions offrent des perspectives d’évolution intéressantes et attractives. « Les métiers d’audit et le contrôle interne sont de véritables pépinières de talents, précise Olivia Jacob, senior manager en charge des équipes finance et immobilier chez Robert Walters. Si le contrôle interne est davantage un métier technique et passion, qui permet des évolutions transverses sur des sujets différents (IT, RH, RSE…), l’audit interne peut quant à lui conduire à des fonctions de management puis de direction audit & contrôle internes, contrôle financier puis DAF. »