Flotte automobile

De la voiture connectée à la voiture autonome : la révolution est en marche

Publié le 30 septembre 2016 à 10h16    Mis à jour le 27 juillet 2021 à 11h22

Anne del Pozo

Fortement impactée par un environnement réglementaire toujours plus exigeant en matière d’environnement ainsi que les innovations technologiques, l’industrie automobile entre actuellement dans une nouvelle ère. Elle sera notamment marquée, dans les années à venir, par la montée en puissance des motorisations «propres» mais également des technologies permettant une conduite connectée voire, à terme, autonome.

Le marché automobile mondial est aujourd’hui à la croisée des chemins.«L’industrie automobile fait actuellement face à ses plus grands défis depuis Henry Ford, souligne Laurent Petizon, managing director chez AlixPartners. En 2030, la moitié des véhicules seront à moteur électrique ou hybride et presque tous seront connectés. La chaîne d’approvisionnement subira de grands changements et les coûts de production devraient être réduits grâce à la systématisation des approches digitales. Les services en ligne influenceront fortement la conduite et apporteront de nouvelles sources de revenus pour les constructeurs et de substantielles économies pour les entreprises. Parallèlement, les solutions d’autopartage continueront de progresser.»

L’inéluctable montée en puissance des véhicules propres

Parmi les principales innovations technologiques attendues sur les véhicules, celles relatives aux motorisations figurent parmi les plus importantes. Alors que la fiscalité sur les véhicules polluants et les prix des carburants ne cessent d’augmenter, les entreprises sont en effet de plus en plus vigilantes quant à leurs émissions de CO2 et leur consommation en essence ou diesel. Une tendance qui les conduit de plus en plus à choisir des véhicules propres, hybrides ou électriques.

La dernière étude d’AlixPartners (juin 2016) anticipe d’ailleurs une montée en puissance de ces motorisations.

En effet, bien que les constructeurs automobiles soient à même de répondre aux normes d’émission demandées, le coût des technologies de réduction de ces dernières (notamment de NOx) devrait augmenter de manière significative tandis que dans le même temps les coûts des véhicules électriques et hybrides baisseront considérablement. «En 2025, ces véhicules (surtout les hybrides) représenteront en Europe 35 % à 40 % de toutes les ventes de voitures neuves, et plus de 65 % en 2030, ajoute Laurent Petizon. Une progression qui se fera surtout au détriment du moteur diesel, qui devrait perdre totalement son attrait au-delà même des petits véhicules. En termes de TCO (total cost of ownership), les véhicules hybrides tendent ainsi à rejoindre les diesel. D’ici à 2025, les consommateurs ne verront pas de différence notable entre le prix d’un véhicule traditionnel et une voiture électrique.»

Le développement de l’électrique demeure cependant encore freiné par l’autonomie des véhicules et surtout par l’infrastructure du territoire. En effet, à ce jour, très peu de pays ont mis en place un programme efficace et alloué les financements nécessaires au déploiement du marché de la voiture électrique à grande échelle. «Par exemple, en Europe et en France, les grandes villes manquent toujours cruellement de bornes de recharge», souligne Laurent Petizon.

Un secteur en passe de se digitaliser

Selon AlixPartners, les investissements nécessaires à la transition vers l’électrique pourront néanmoins être compensés, du côté des constructeurs, par les opportunités offertes par les nouveaux outils digitaux afin d’accroître l’efficacité opérationnelle. «Les bénéfices de la transparence et de la prévisibilité accrue sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement pourraient conduire à des réductions de coûts structurels de 5 % à 25 % en fonction des processus mis en place, indique ainsi Laurent Petizon. Les coûts des stocks ou ceux de la maintenance pourraient être réduits de 20 % à 35 %, et une digitalisation accrue de l’industrie impacterait positivement les pratiques en matière de qualité, d’analyse clients ou de suivi de la rentabilité pour un pilotage plus fin.»

Les entreprises plébiscitent les innovations technologiques

La digitalisation du secteur de l’automobile favorisera en outre la montée en puissance des technologies permettant une conduite connectée, voire autonome. Avec, selon AlixPartners, une prévision de près 90 % de nouveaux véhicules connectés en sortie d’usine dans le monde en 2020 et de 30 % de véhicules connectés sur l’ensemble du parc mondial, de nombreux challenges apparaissent quant au transfert des données en temps réel, à la gestion des flottes et de trafics et aux économies de coûts et d’énergie…

A titre d’exemple, les boîtiers télématiques embarqués dans les véhicules contribuent à la réduction des coûts en carburant et ce, à double titre. D’une part, l’optimisation des trajets, qui passe par les solutions de géolocalisation, d’analyse d’itinéraires et d’affectation de missions en temps réel permet de réduire le nombre de kilomètres parcourus et donc d’optimiser les trajets. D’autre part, l’amélioration des habitudes de conduite qui, pour sa part, passe par des outils d’aide à la conduite et des formations, a un impact positif sur la consommation de carburant.«Nous enregistrons en moyenne une réduction de 10 % de la consommation en carburant chez nos clients qui utilisent nos solutions, explique Marc Trollet, directeur général MiX Telematics Europe. Les avantages de la télématique ne se limitent toutefois pas à cette simple constatation. Une meilleure planification des itinéraires et de meilleures habitudes de conduite permettent en effet aussi aux entreprises de réduire la taille de leur flotte, retarder l’usure de leurs véhicules et faire baisser les taux d’accidents.» Malgré les coûts des services digitaux actuellement proposés par les constructeurs et les loueurs, les entreprises et les automobilistes semblent néanmoins prêts à payer dans la mesure où ils bénéficieront en contrepartie d’économies sur leur consommation de carburant, leur assurance ou encore la maintenance de leur véhicule devenue prédictive. «Chaque véhicule connecté pourrait générer jusqu’à 800 $ d’économie par an, estime Laurent Petizon. Des économies notamment réalisées sur les postes assurance (30 %), carburant (5 %) et entretien (10 %)».

Les conducteurs en attente de véhicules connectés

Du côté des conducteurs, 59 % des acheteurs européens (66 % en France) interrogés dans le cadre d’une étude TNS/BearingPoint Institute (mai 2016) déclarent que les équipements et fonctionnalités connectées ont influencé leur parcours d’achat du véhicule. L’étude révèle néanmoins que 4 conducteurs de voitures connectées sur 10 (3 sur 10 en France) ignorent encore tout des fonctionnalités de connectivité de leurs véhicules. «La connectivité est une opportunité formidable pour présenter de nouveaux bénéfices aussi bien fonctionnels qu’émotionnels auprès des conducteurs, explique Karen Tartour, directrice du pôle automobile TNS Sofres. Créateurs de valeurs, vecteurs de différenciation, les équipements embarqués et connectés doivent être mis en avant, expliqués pour assurer aux conducteurs des expériences réussies, et générer de l’engouement.»

De manière générale pour les conducteurs, les principaux avantages de la voiture connectée sont à parts égales la sécurité et la navigation (62 %) et, pour 55 %, les indicateurs de conduite (consommation de carburant, comportement routier). L’accès aux services multimédias n’est pour sa part considéré comme un avantage que par 40 % des conducteurs. Côté fonctionnalités, celles jugées les plus pertinentes pour l’achat d’une voiture sont l’infotainment (wi-fi embarqué ou hotspot, réseaux sociaux, streaming musical, lecture et saisie de SMS, applis, etc.) à 45 % (51 % en France) et la navigation GPS à 49 % (47 % en France). Ces deux fonctionnalités demeurent aussi les plus utilisées par les conducteurs une fois en possession de leur véhicule connecté : 55 % utilisent l’infotainment (62 % en France) et 53 % utilisent la navigation (50 % en France). Viennent ensuite les équipements de confort, commande au volant, ordinateur de bord, ouverture/démarrage sans clé, etc. (20 %), l’assistance à la conduite (19 %) puis à égalité, les fonctionnalités relatives à l’entretien du véhicule ou à l’assistance automatique (11 %).

Si l’étude relève que les marques Audi, BMW et Mercedes sont les mieux perçues en termes de simplicité d’utilisation de leurs équipements connectés, les constructeurs automobiles doivent néanmoins rester vigilants pour proposer et entretenir avec leurs clients des expériences de conduite connectée positives et pérennes. A l’égal des applications sur smartphones dans lesquelles des géants de la technologie comme Google et Apple ont déjà fortement investi, ces fonctionnalités doivent avant tout être faciles à utiliser, pratiques et intuitives.«Les voitures connectées ouvrent ainsi une nouvelle ère automobile, commente ainsi Sarah-Jayne Williams, associée BearingPoint. Les équipementiers voient se déplacer leur modèle B2B vers un modèle B2C où ils ont l’opportunité de construire une relation durable avec leurs consommateurs. L’offre est en train de changer : de produits physiques, ils vendent désormais des plateformes de services digitaux. Pour réellement exploiter cette nouvelle ère, les constructeurs doivent investir au bon endroit, de manière à s’assurer que les conducteurs aient du plaisir à utiliser leurs fonctionnalités.»

Des véhicules connectés aux véhicules autonomes

Alors que nous sommes donc résolument entrés dans l’ère du véhicule connecté, les constructeurs renforcent plus que jamais leurs recherches, développements et investissements dans les véhicules autonomes.

«Mais pour que la conduite autonome soit une réalité, chaque voiture doit pouvoir communiquer avec les autres véhicules, quels qu’ils soient, conclut Bruno Laborie, directeur des alliances EMEA chez Tradeshift. Ce transfert massif d’informations doit par ailleurs être géré 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, sans interruption de services. Les voitures autonomes impactent donc les fondements de l’industrie au-delà de l’automobile, y compris l’assurance ou encore la logistique. Elles représentent l’une des technologies les plus disruptives et vont induire de profonds changements dans le paysage que nous connaissons : avec ces véhicules, les passagers ne conduiront plus et pourront travailler, consommer, discuter…»

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