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Sens de la fusion

L’absorption d’une entité bénéficiaire par une société déficitaire peut être constitutive d’un abus de droit

Publié le 27 juin 2014 à 17h00

Emmanuelle Féna-Lagueny

On sait que, depuis 1986 (décision Société Auriège du 21 mars), le Conseil d’Etat juge que la circonstance que la fusion est économiquement justifiée écarte à elle seule toute possibilité de contestation du sens de la fusion, qui relève de l’appréciation souveraine des parties à l’opération.

Par Emmanuelle Féna-Lagueny, avocat counsel, CMS Bureau Francis Lefebvre.

Cette décision valide donc le principe de l’absorption de la société bénéficiaire par la société déficitaire, à condition bien entendu que la société absorbante n’ait pas changé d’objet ni d’activité. L’administration a repris dans sa base documentaire cette décision mais en ajoutant qu’elle s’estime fondée, le cas échéant, à contester l’opération sur le fondement de l’abus de droit (article L 64 du LPF).

Le Conseil d’Etat lui donne raison dans la situation suivante : une société S avait constaté d’importants déficits. Elle acquiert, grâce au concours financier d’une autre filiale du groupe, une société D qui bénéficiait d’une trésorerie élevée et dont le bénéfice imposable (égal au montant de sa trésorerie moins l’impôt normalement dû) était d’un montant équivalent à ses déficits reportables. La société S absorbe la société D qu’elle vient d’acquérir et trouve alors un terrain d’imputation pour ses déficits reportables.

L’abus de droit est constaté par le Conseil d’Etat, qui note les similitudes de montants entre le déficit imputable de S et le bénéfice de D, ainsi que les circonstances suivantes :

− la société S ne disposait plus des moyens humains et financiers lui permettant d’exercer son activité, elle a d’ailleurs dû bénéficier du concours d’une autre société du groupe pour acquérir les titres de la société absorbée ;

− la société D absorbée avait cédé tous ses moyens de production et cessé toute activité au cours de l’exercice de fusion ;

− les domaines d’activité des deux sociétés étaient très différents (l’une marchand de biens, l’autre distribution en gros d’accessoires automobiles) ;

− enfin, le prix d’acquisition des titres de la société D correspondait approximativement au montant de la trésorerie de cette dernière.

L’objectif de restructuration était dénué de toute portée, tandis que le gain de trésorerie était négligeable et sans commune mesure avec l’avantage fiscal retiré de ces opérations. Dans ces conditions, le CE juge que la fusion réalisée, qui n’avait aucune justification économique, n’a pu être inspirée par aucun autre motif que de...

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