Pour contrecarrer le projet d’acquisition de Veolia, Suez a sanctuarisé l’un de ses actifs stratégiques dans une fondation de droit néerlandais, ou «stichting», une première dans ce type d’opérations en France. Ce dispositif peu orthodoxe présente un certain nombre d’avantages pour son initiateur, mais n’est pas totalement infaillible.
«C’est scandaleux ! Comment le conseil d’administration de Suez a-t-il pu passer outre le consentement des actionnaires du groupe ?» s’insurge Catherine Berjal, présidente de la société de gestion CIAM, actionnaire minoritaire de l’entreprise spécialisée dans les services à l’environnement. Comme elle, beaucoup d’observateurs ont été stupéfaits par la décision des administrateurs de Suez de sanctuariser une partie du capital de sa filiale Suez Eau France dans une fondation néerlandaise (appelée «stichting») pour se défendre contre l’offensive de Veolia. Et pour cause : aucune entreprise française n’avait jamais eu recours à une telle «pilule empoisonnée» dans le cadre d’une OPA hostile. «C’est la première fois que ce dispositif est mis en place dans une acquisition impliquant deux entreprises domestiques, confirme un spécialiste proche du dossier. En 2006, Arcelor avait certes utilisé la même “poison pill” pour tenter de contrecarrer l’offensive de Mittal, mais l’actif sanctuarisé dans sa Strategic Steel Stichting était une filiale canadienne – Defasco – et l’OPA était régie par le droit du Luxembourg, siège de l’aciériste européen à l’époque.»
Un choix de «poison pills» limité
La manœuvre de Suez a d’autant plus surpris le marché que le groupe dirigé par Bertrand Camus n’a même pas attendu de savoir si son actionnaire principal, Engie, allait vendre la part de 29,9 % qu’il détient dans son capital. Pour répondre rapidement à l’offensive de Veolia, il avait, de fait, peu d’options. Il aurait pu, par exemple,...