Les stock-options auront animé une partie de l’actualité fiscale du mois d’octobre 2013 avec deux décisions, notables par leur enchaînement, touchant au sujet brûlant du traitement fiscal des gains de levée d’options octroyées avant la loi TEPA d’août 2007 dans un contexte international.
Par Georges Morisson-Couderc, avocat associé, Landwell & Associés et Nathalie Delmarès, avocat, Landwell & Associés
Si la qualification du gain de levée comme complément de salaire en droit interne, comme endroit conventionnel, ne se pose plus pour les options sur actions consenties postérieurement à l’entrée en vigueur de la loi TEPA, un doute légitime subsiste toujours pour les options consenties avant cette date. Le droit interne alors applicable prévoit en effet que l’imposition du gain de levée d’options réalisé après le délai d’indisponibilité doit être établie selon le régime d’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières.Le Conseil d’Etat a, dans une décision du1er octobre 20131, considéré sur le fondement du seul droit interne que «l’avantage égal à la différence entre la valeur réelle d’une action à la date de la levée de l’option et le prix de souscription[…] de cette action constitue […] un complément de salaire imposable, alors même que ce gain serait imposé selon le régime dérogatoire d’imposition des plus-values de cession de valeurs mobilières».
Il s’agissait, en l’espèce, d’options d’achat d’actions octroyées en 1993, 1994, 1995 et 1996 puis levées et cédées en 2002 alors que le contribuable était résident fiscal des îles Vierges britanniques. Selon la cour administrative d’appel de Paris, le gain devait être regardé en application du droit interne comme un gain en capital car relevant du régime d’imposition spécifique de ce type de gain. Or, le Conseil d’Etat souligne que la cour a commis une erreur de droit et de qualification juridique en jugeant que ce gain avait la nature d’un gain en capital alors qu’un tel gain constituait un complément de salaire en dépit de son régime d’imposition spécifique.
La portée de cette décision pourrait donc sembler considérable à première vue dans la mesure où le Conseil d’Etat ne s’était jamais prononcé sur la nature de la plus-value d’acquisition destock-options pour lesquelles le délai d’indisponibilité fiscale a été respecté. Il convient toutefois de relativiser son importance dans la mesure où le Conseil d’Etat ne se prononce cette fois-ci que dans le cadre du droit interne français. La cour administrative d’appel de Paris, sur renvoi,devra dès lors tirer les conclusions de ce que l’imposition en France de ce gain est bien fondée. Toutefois, dans la mesure où il n’existe pas de convention fiscale entre la France et les îles Vierges britanniques, le raisonnement devrait s’arrêter là.
Il nous apparaît dès lors plus prudent d’attendre la décision de la haute assemblée appelée à se prononcer prochainement sur l’arrêt de la cour administrative d’appel de Versailles du 18 avril dernier2, et devoir quelle analyse fera le Conseil d’Etat en présence d’une convention fiscale ne contenant pas de stipulations conventionnelles définissant la plus-value d’acquisition sur stock-options : s’attachera-t-il à la nature du revenu ou à son régime d’imposition pour rapprocher la qualification de droit interne, sur le fondement de laquelle l’imposition est établie, des stipulations de la convention ? Dans le même temps, le tribunal administratif de Montreuil opère un revirement de jurisprudence intéressant.
Le 18 octobre 20133, dans le cadre de la convention franco-belge appliquée à un non-résident fiscal français, le tribunal a estimé que «la taxation des plus-values en litige a été opérée en droit interne sur le fondement des dispositions relatives aux revenus de capitaux mobiliers auxquels lesdits revenus étaient assimilés; qu’ainsi, et alors même que l’avantage en litige trouve sa source dans le contrat de travail du contribuable, c’est à tort que l’administration s’est fondée, pour assujettir les requérants à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, sur les stipulations relatives aux traitements,salaires et autres rémunérations analogues».
Il fait ensuite application de l’article 18 (clause balai) pour retirer à la France tout droit d’imposer le gain de levée d’options. La conclusion du débat technique semble proche et le Conseil d’Etat va pouvoir apporter une réponse définitive au sort des options pré-TEPA dans l’ordre international.