Entretien avec François Humbert, engagement lead manager chez Generali Insurance Asset Management. Plutôt qu’exclure les entreprises les moins bien positionnées sur le plan extra-financier, les asset managers veulent les transformer de l’intérieur, grâce à l’engagement actionnarial. Mais l’efficacité de leurs démarches est questionnée. Pour François Humbert, qui – en plus de ses fonctions chez GIAM – assure la présidence du comité de pilotage de Climate Action 100 +, il faut changer d’approche.
Depuis plusieurs années, les investisseurs mettent en avant le dialogue qu’ils nouent avec les entreprises pour les faire progresser sur les enjeux durables. La qualité de cet engagement, mené la plupart du temps en coulisses, est difficile à évaluer. Vous avez développé une approche innovante de l’engagement, autour de la notion d’ « alpha ». En quoi consiste-t-elle ?
La première question qu’il faut se poser, lorsque l’on fait de l’engagement actionnarial, est de savoir si l’on fait une différence ou non. C’est essentiel pour pouvoir démontrer l’utilité de son action à sa hiérarchie. C’est également fondamental pour allouer au mieux les ressources internes qui sont loin d’être inépuisables en matière d’engagement. Deux types de résultats peuvent être obtenus. On peut tout d’abord constater que, suite à une action d’engagement (dialogue en privé, communication publique, vote en assemblée générale), l’entreprise a fait évoluer ses pratiques : on peut prouver qu’on a eu l’intention de la faire changer mais pas dans quelle mesure on a contribué à ce changement. On ne peut pas mesurer un véritable « retour sur engagement ». Au final, rien ne dit qu’envoyer une simple lettre au management de l’entreprise n’aurait pas eu le même résultat. Cette logique d’« intentionnalité » pousse vers des pratiques moins-disantes et ne résout pas le problème du passager clandestin : il peut suffire d’apposer son nom à une ac...