« L’année 2020 aura été une année de grande tension pour l’AMF », reconnaît Robert Ophèle, son président, en préambule de l’édition 2020 du rapport annuel de l’institution. Le document révèle combien les situations inédites nées de la crise sanitaire ont conduit l’Autorité des marchés financiers « à utiliser pour la première fois certains de ses pouvoirs ».
Un test de résistance grandeur nature
Le gendarme boursier a dû par exemple interdire les ventes à découvert, du 17 mars au 18 mai 2020. En août, il lui a fallu suspendre les souscriptions et rachats de parts de fonds gérés par la société britannique H2O Asset Management LLP. Pour la première fois sous le nouveau régime issu de la loi Pacte, des « side pockets » ont permis d’isoler les actifs illiquides, tandis que les actifs sains ont été transférés à un nouveau véhicule créé à cet effet. « Souvent cité comme l’un des foyers de risque systémique, indique le rapport, le secteur de la gestion d’actifs a vécu la crise de la Covid-19 comme un véritable test de résistance grandeur nature. Problèmes de liquidité, difficultés à valoriser certaines classes d’actifs ont été autant de défis relevés avec succès. » L’AMF souligne le rôle de ses outils de surveillance et de son accompagnement dans le contrôle de chacun de ces événements, alors que la quasi-totalité de ses effectifs était en télétravail.
Une influence qui faiblit
C’est pourtant un bilan plus général très mitigé que dresse le superviseur sur 120 pages, et qui le conduit à réaffirmer cinq priorités : accompagner la montée en puissance de l’actionnariat individuel, assurer un meilleur fonctionnement des mécanismes de marché, mieux structurer le développement de la finance durable, adapter le cadre réglementaire et de supervision de la gestion d’actifs aux risques associés, et développer la souveraineté financière de l’Union européenne (UE) après la sortie du Royaume-Uni.
Robert Ophèle, qui souhaitait, en arrivant à sa tête en 2017, faire de l’AMF « le superviseur de référence dans l’UE », souligne aujourd’hui à quel point les moyens de l’AMF restent bien inférieurs à ceux de ses homologues à l’étranger. « Notre influence faiblit alors que les enjeux sont considérables et que les décisions les plus structurantes se prennent au niveau européen, alerte-t-il. J’appelle donc à un sursaut dans ce domaine afin que le régulateur français dispose de moyens à la hauteur du premier marché financier de l’Union. »