Avant le friendshoring, le friendfinancing
Dans un nouvel environnement géopolitique, de confrontation des blocs, les Etats cherchent à accroître leur souveraineté économique. Cela doit modifier la cartographie des échanges commerciaux et des chaînes de valeur. En pratique, nous devrions observer plusieurs phénomènes : la relocalisation des unités de production (reshoring), le déplacement d’une activité économique dans un pays voisin (nearshoring) ou dans un pays allié (friendshoring).
Cette recomposition dans la sphère réelle a son pendant dans la sphère financière. Depuis 2016, la détention de dette américaine par la Chine a régulièrement baissé. Est-ce que cela a posé un problème de financement sur la dette américaine ? Non, parce que le relais a été entièrement pris par les investisseurs européens. La hausse de la détention européenne d’obligations du Trésor américain a même surcompensé la baisse du stock détenu par les investisseurs chinois. Depuis 2016, le stock de dette américaine détenu par la Chine est passé de 1 300 à 800 milliards de dollars, alors que dans le même temps, la détention par l’Europe est passée de 900 à 1 900 milliards de dollars.
La nouvelle confrontation de puissances provoque une recomposition des flux mondiaux d’épargne, renforçant le « biais domestique » ou, à tout le moins, le « biais régional ». Les pays développés se financent davantage entre eux, aux dépens des investissements dans les pays émergents. Avant d’envisager le friendshoring, il y a un phénomène que nous pouvons d’ores et déjà évoquer, le friendfinancing.
Christophe Morel est chef économiste de Groupama Asset Management
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