Crise européenne:guérison ou rémission ?
Dès l’ouverture des marchés le 2 janvier, les investisseurs se sont mis en quête de rendement pour leurs portefeuilles obligataires. Des achats massifs sur la plupart des pays périphériques, notamment l’Italie et l’Espagne, ont provoqué une baisse de leur taux en dessous de 4 % sur les échéances à dix ans. Ce mouvement efface pratiquement tous les effets de la crise de la dette européenne depuis 2010, au cours de laquelle les rendements espagnols avaient culminé à 7,5 %. Il faut s’en réjouir, car le coût d’emprunt s’en trouve allégé d’autant et crée ainsi un cercle vertueux restaurant la solvabilité de ces pays.
Ce retour de la confiance s’appuie non seulement sur les efforts de consolidation budgétaire en cours, mais également sur l’espoir d’une reprise économique amplifiée par la vigueur de la croissance américaine (+ 2,7 % en 2014). Cette amélioration conjoncturelle est soutenue par des banques centrales aux politiques monétaires toujours très accommodantes, même si la Fed a enfin lancé son fameux «tapering». De son côté, la Banque centrale européenne va maintenir quasi nul le coût de la liquidité, car en Europe la désinflation est plus forte qu’ailleurs. Le sentiment de sortie de crise est aussi alimenté par les nouvelles avancées institutionnelles, en particulier grâce à l’accord sur le mécanisme de supervision unique et les directives d’harmonisation des garanties des dépôts et de résolution bancaire.
Cependant, l’euphorie porte en elle le danger d’un retour au laxisme budgétaire des Etats de l’UE. Les engagements et les objectifs de réduction des déficits ne sont déjà plus une priorité. Le ratio dette/PIB continue de se dégrader pour la majorité des pays (134 % pour l’Italie). Si la croissance économique attendue n’est pas au rendez-vous, les affres de la crise pourraient très vite refaire surface et prendre au piège les investisseurs.
Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.
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