Des marchés obligataires en phase avec la BCE
Lors de son dernier comité de politique monétaire, la BCE a pris les marchés par surprise, en abaissant son taux directeur pour l’établir à un plus bas historique, à 0,25 %. La raison principale invoquée par l’institution est, bien entendu, la baisse de l’inflation en zone euro à 0,80 %, niveau de nature à remettre en cause sa définition de la stabilité des prix.
La désinflation actuelle provient, d’une part, de la baisse des coûts de main-d’œuvre, notamment en Espagne, qui a opté pour une forme de dévaluation interne et, d’autre part, du recul des cours de l’énergie, accentué par l’appréciation de l’euro. De surcroît, l’effet antérieur des hausses de taxes s’atténue et pousse à la baisse les indices de prix. Le risque déflationniste n’est plus nul. Pour le contrer, elle envisage de rendre négatif son taux de dépôts à - 0,10 %.
Les marches obligataires ont salué la réactivité de la BCE par des taux d’intérêt encore plus bas sur la partie courte de la courbe, l’emprunt d’Etat allemand à deux ans revenant à 0,10 %. L’ancrage qui en résulte correspond parfaitement à la volonté de la Banque centrale de retarder au maximum les anticipations de remontée des taux.
La BCE souhaite également faire baisser l’euro et décorréler les taux européens de ceux des Etats-Unis. Ce contexte reste donc très favorable aux actifs risqués, même si leur performance récente est déjà substantielle. Nous continuons de privilégier les obligations des pays périphériques et les titres d’entreprises ou bancaires à bêta élevé qui en sont les principaux bénéficiaires.
Il convient néanmoins de ne pas céder à l’euphorie et de rester très sélectif sur la qualité des émetteurs mis en portefeuille. En tout état de cause, la proactivité et l’inventivité de la BCE procurent aux marchés la liquidité attendue et assurent une protection en cas d’aléa baissier.
Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.
Du même auteur
Mise à profit de la volatilité des chiffres macroéconomiques américains
Réputées retardées par rapport à la réalité de l’activité, et souvent révisées, les données d’emploi…