En quête de bonnes références
Le débat sur la fiabilité des références de marché et sur l’intégrité des process permettant leur détermination continue de rebondir. La décision de certains acteurs de marché de se retirer des panels de contributeurs, récemment sur les matières premières, est une menace sur la représentativité des plus importants indices concernant notamment les taux de marchés, Libor en tête. Les montants des amendes, dépassant plusieurs milliards de dollars, en rapport certes avec le potentiel de manipulation de ces indices, prêtent évidemment à réfléchir.
Après la contestation des indices classiques de marché dont les travers sont désormais mieux appréhendés, ce sont désormais les prix eux-mêmes dont la formation et la manipulation frauduleuses sont remis en question. La crise nous a rappelé qu’un marché pouvait disparaître ; c’est maintenant, en dépit de l’existence d’acteurs de marché, la question de la mesure intègre et représentative qui va se poser. Car si un gros acteur ne contribue plus, que dire de la qualité de la mesure ?
Force est de constater qu’en l’absence d’institut de mesure indépendant et de règles précises, contrôlées et régulièrement revues à l’aune des évolutions technologiques, les difficultés bien connues dans d’autres segments des marchés peuvent produire des effets comparables, parfois néfastes. Si le coût de cette production n’est pas nul, il faut le compenser. Mais l’excès inverse, pour raison de monopole ou quasi-monopole, est également dangereux : n’est-il pas aussi exorbitant d’avoir à payer un fournisseur de données au motif qu’un document réglementaire, par exemple le prospectus d’un fonds, mentionne un indice dont il est producteur ?
L’industrie de la gestion ferait bien de reconsidérer les références dont elle a vraiment besoin, pour ses clients, pour ses contrôleurs et pour elle-même. La lucidité sur les besoins, sur les coûts et sur les risques potentiels pourrait bien aboutir à une révision sérieuse des références utilisées et même des produits proposés. Les fonds obligataires à maturité et l’engouement pour des approches de Buy & Maintain ne traduisent-ils pas une évolution, en matière de taux, qui illustre cette tendance ?
Jean-François Boulier est président d'honneur de l'Af2i.
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