La BCE ne doit pas perdre son combat contre la déflation
L’inflation dans la zone euro a diminué à 0,7 % en février, bien en dessous de l’objectif de la BCE fixé à 2 %. Les pays périphériques affichent les plus bas scores : 0,4 % en Italie et 0,1 % en Espagne. Certains sont en déflation avec - 0,9 % en Grèce et - 0,1 % au Portugal. Même l’Allemagne, qui pourtant bénéficie de la croissance la plus soutenue, a vu son inflation quasiment divisée par deux : de 1,8 %, elle s’élève maintenant à 1 %.
Cette tendance désinflationniste est le contrecoup des deux années de récession en 2012 et 2013 qu’a endurées une zone euro en pleine austérité. Aujourd’hui, la croissance revient sous la forme d’un rattrapage cyclique, mais reste insuffisante pour contrer le risque de déflation. De surcroît, des forces externes à l’Europe visant à renforcer le cours de l’euro contribuent également à faire baisser l’inflation : le Japon cherche à exporter sa déflation par la dépréciation du yen et le cours de change de certains pays émergents en difficulté chute lourdement. Or, 10 % d’appréciation de l’euro poussent l’inflation à la baisse de 0,4 à 0,5 %.
Bien entendu, une inflation basse procure un surplus de pouvoir d’achat au consommateur, mais, à l’inverse, la déflation constitue un frein structurel à la croissance car elle retarde les intentions d’achat sur des anticipations de prix plus bas à terme. Il semble que la BCE ait enfin pris conscience du danger déflationniste. Elle affûte ses armes, probablement non conventionnelles (taux négatifs, QE…), qui doivent être à la fois efficaces et compatibles avec son mandat. D’une politique réactive, elle va basculer vers la prévention. Il lui faut à tout prix éviter la déflation pour ne pas avoir à la combattre. Ainsi, en matière d’investissement, il est encore temps de mettre en portefeuille des titres indexés sur l’inflation pour bénéficier de son rebond, qui signalera le succès de la BCE sur la déflation.
Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.
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