L’écart dramatique (plus de 5 points) entre les taux d’intérêt réels à long terme et les taux de croissance réels en Espagne et en Italie

Publié le 28 novembre 2013 à 15h24    Mis à jour le 30 avril 2014 à 18h10

Patrick Artus

Depuis la fin de 2012, l’inflation a considérablement reculé dans les pays de la zone euro ; en Espagne, elle n’est plus aujourd’hui que de 0,3 % ; en Italie de 0,9 %. Si la désinflation soutient à court terme le pouvoir d’achat, elle a l’effet extrêmement négatif de faire monter les taux d’intérêt réels (corrigés de l’inflation) à long terme. Avec un taux d’intérêt à 10 ans de 4,1 % aujourd’hui, l’Espagne et l’Italie ont des taux d’intérêt réels à long terme de 3,8 % (Espagne) et 3,2 % (Italie). Il faut les comparer aux taux de croissance (du produit intérieur brut) en volume attendus pour 2013 dans ces deux pays :

– 1,3 % en Espagne et

– 1,9 % en Italie, avec la prolongation de la récession. Un tel écart (plus de 5 points) entre le taux d’intérêt réel à long terme et le taux de croissance a des conséquences catastrophiques : il déprime l’investissement, surtout il empêche le retour à la solvabilité des agents économiques emprunteurs.

Prenons l’exemple des dettes publiques (presque 100 % du PIB en Espagne, plus de 130 % du PIB en Italie). Avec un écart de 5 points entre le taux d’intérêt réel à long terme et la croissance, il faut un excédent budgétaire primaire (hors intérêts sur la dette publique) de 5 points du PIB en Espagne et 6 points ½ du PIB en Italie pour stabiliser le taux d’endettement public. De tels excédents budgétaires primaires sont impossibles à attendre, ce qui illustre le caractère dévastateur de la désinflation lorsque les taux d’intérêt nominaux ne peuvent plus la suivre.

Patrick Artus Membre du Cercle des Economistes

Patrick Artus est Chef économiste de Natixis depuis mai 2013. Polytechnicien, diplômé de l’Ensae, et de l’IEP Paris, Patrick Artus intègre l’Insee en 1975, où il participe notamment à des travaux de prévision et de modélisation, avant de rejoindre, cinq ans plus tard, le département d’économie de l’OCDE. En 1982, il devient directeur des études à l’Ensae puis il est nommé, trois ans plus tard, conseiller scientifique au sein de la direction générale des études de la Banque de France. En 1988, il intègre la Caisse des dépôts et consignations, où il exerce successivement en tant que chef du service des études économiques et financières puis responsable de la gestion actif-passif. En 1993, il est nommé directeur des études économiques, responsable de la recherche de marché chez CDC-Ixis. Devenu en 1998 directeur de la recherche et des études de Natixis, il est promu chef économiste en mai 2013. Depuis septembre 2024, il est conseiller économique d'Ossiam. Il est également membre du Cercle des Economistes.

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