
L’euro peut-il devenir une valeur refuge ?
A l’heure où les regards sont rivés sur les barrières douanières érigées par Donald Trump, il est essentiel de se projeter au-delà de l’année 2025.
Car la relance budgétaire récemment approuvée par le parlement allemand stimulera fortement la croissance outre-Rhin dans les années à venir, ce qui profitera également à la zone euro, bien que de manière plus limitée. Parallèlement, la gestion chaotique des affaires publiques par l’administration Trump peut affecter la position du dollar en tant que valeur refuge. Il est à noter que sa part dans les réserves de change mondiales décline déjà depuis une décennie, s’établissant actuellement à son niveau le plus faible depuis 30 ans (57 % en 2024, en comparaison avec un sommet de 71 % en 1999).
L’euro n’a pas réussi à concurrencer le dollar en tant que monnaie de réserve internationale. Sa part s’est stabilisée autour de 20 % ces dernières années (vs 18 % en 1999). Plusieurs facteurs expliquent cet échec, notamment la crise des dettes souveraines, la fragmentation financière et l’absence d’un gisement de titres de dette publique européenne pouvant rivaliser avec les titres du Trésor américain.
Cependant, les réformes et projets en cours en Europe, combinés à la stratégie de financement adoptée en Allemagne (importantes émissions obligataires en vue) changent la donne. Ces émissions viendront s’ajouter aux dettes existantes libellées en euros déjà émises par l’UE. Par ailleurs, la proposition d’un financement mutualisé de la défense recueille de plus en plus d’écho en Europe. En attendant, sous réserve que les pays de la zone euro parviennent à stabiliser leur ratio dette/PIB, leurs dettes nationales devraient servir de substitut. Ce qui pourrait renforcer la position de l’Europe dans l’économie mondiale, et accroître le rôle international de l’euro.
Didier Borowski est responsable de la recherche sur les politiques macroéconomiques au sein de l’Amundi Investment Institute. Auparavant, il a exercé plusieurs fonctions : responsable de la stratégie Taux et Changes, co responsable de l’équipe de Stratégie et Recherche économique, responsable de la macroéconomie puis plus récemment responsable global views. Avant de rejoindre Amundi, il était économiste et stratégiste senior de Société Générale Asset Management (2000-2009). Didier Borowski a commencé sa carrière au sein de la Direction de la Prévision du Ministère de l’économie et des finances. Il a également exercé les fonctions d’expert auprès de la Commission européenne. Didier Borowski est Docteur ès sciences économiques. Il a été Professeur associé à l’Université Paris Nord (2007-2011) puis a enseigné plusieurs années à l’université Paris-Dauphine.
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