Point de vue

L’exécution d’une sentence arbitrale face aux allégations de corruption

Publié le 21 avril 2023 à 15h17

King & Spalding International LLP

Par Marc-Olivier Langlois, associé et Agnès Bizard, counsel, équipe arbitrage international, King & Spalding 

•L’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles le 14 mars dernier mérite une attention particulière.

•L’affaire Alstom /Alexandre Brothers (ABL) trouve son origine dans trois contrats de consultation aux termes desquels ABL s’est engagée à assister Alstom dans la soumission d’offres de fourniture de matériel ferroviaire en Chine. Alstom n’ayant réglé que partiellement ABL au titre des deux premiers contrats et refusé tout versement au titre du troisième, ABL a initié un arbitrage CCI aux fins d’obtenir le paiement de ses prestations.

•Durant l’arbitrage, Alstom a justifié son refus de paiement par l’existence d’indices de corruption entre ABL et des agents chinois. Estimant qu’Alstom n’avait pas rapporté la preuve de ses allégations de corruption, le tribunal arbitral l’a condamnée au paiement de la somme de 1,7 million d’euros.

•ABL s’est ensuite tournée vers les tribunaux pour obtenir l’exécution de sa sentence. Les juridictions suisse et anglaise ont accordé l’exequatur, refusant de remettre en cause la décision du tribunal arbitral sur le fond. La cour d’appel de Paris a, en revanche, procédé à un contrôle plus poussé.

•Le 28 mai 2019, elle a infirmé l’ordonnance conférant l’exequatur à la sentence, considérant qu’il existait des indices « graves, précis et concordants » de corruption de la part d’ABL, parmi lesquels la notation inférieure de l’offre d’Alstom par rapport à ses concurrents, une comptabilité suspecte ou encore l’obtention d’un document confidentiel auprès des autorités chinoises.

•Le 29 septembre 2021, la Cour de cassation a censuré cet arrêt au motif que la cour d’appel aurait dénaturé un écrit servant de fondement à l’une de ses constatations de corruption.

•Sur renvoi, la cour d’appel de Versailles, procédant à un nouvel examen, en fait et en droit, a rejeté un par un les huit indices de corruption avancés par Alstom, conférant ainsi l’exequatur à la sentence arbitrale.

•En opérant une appréciation stricte des indices de corruption, la cour d’appel de Versailles rappelle que contrôle ne rime pas avec annulation, et que tout en instaurant un contrôle approfondi de la conformité de la sentence à l’ordre public international, la jurisprudence française maintient un seuil minimal de violation en exigeant que celle-ci soit « caractérisée ».

King & Spalding International LLP

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