Vite, la BCE ! L’inflation se meurt
La consommation mondiale de pétrole atteint un plus haut historique à 94 millions de barils/jour. Toutefois, l’offre de brut croît encore plus rapidement, provoquant en moins de six mois, un effondrement des cours de près de 45 % en euros. Ainsi, et au grand dam de la BCE, l’inflation européenne va inévitablement évoluer cette année très sensiblement en territoire négatif, même si la valeur de l’or noir trouve un point de stabilité.
A plus long terme, les marchés semblent convaincus que l’inflation restera faible à 1,25 % en moyenne sur quinze ans, selon le fixing des swaps d’inflation. En effet, au-delà de la chute du prix des matières premières, des phénomènes plus structurels de «mauvaise» désinflation, réducteurs de croissance potentielle, sont à l’œuvre. Le surendettement des pays développés gèle tout stimulus fiscal et freine la croissance du crédit. Cette dernière demeure négative ou proche de zéro dans les pays développés. Par ailleurs, le vieillissement démographique pousse les investisseurs à choisir la prudence, au détriment du financement productif, comme le montre le niveau des taux obligataires qui atteignent un plus bas avéré, à 0,45 % sur le Bund à dix ans. S’y ajoutent les nouvelles contraintes réglementaires obligeant les banques à augmenter la part des obligations d’Etat au détriment des autres actifs.
Néanmoins, si la baisse des matières premières perdure, elle devrait finalement donner un coup de fouet à la croissance, grâce à la «bonne» désinflation : réduction des coûts pour les entreprises et excédent de pouvoir d’achat mis à disposition des consommateurs.
L’année 2015 verra donc une lutte entre les conséquences de ces deux types de désinflation. Gageons que la BCE, à l’aide de son prochain QE, fasse plutôt pencher la balance vers la «bonne inflation».
Thierry Million est directeur de la gestion obligataire d'Allianz Global Investors France. Ingénieur diplômé en Informatique de l’Institut de Recherche polytechnique de Mulhouse, titulaire d’un DESS en finance de l’Institut Supérieur de Gestion et diplômé de la SFAF, Thierry Million débute sa carrière en 1987 en tant que courtier et responsable de la Trésorerie chez Dynabourse. Il est ensuite gérant obligataire à la Banque Vernes. En 1994 il rejoint Dresdner RCM Gestion en tant que directeur de la gestion obligataire. En 2001 il devient Responsable des activités Product Management et Conseil d’AGF Asset Management. A partir de 2003, il prend la responsabilité des portefeuilles diversifiés des institutionnels et entreprises, ainsi que de la recherche quantitative et économique. En 2006, il est nommé directeur de la recherche économique et quantitative et du Conseil, puis directeur de la gestion obligataire d’Allianz Global Investors en 2008. Depuis 2013, il est directeur de la gestion obligataire institutionnelle.
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