Alors que le choix des véhicules d’entreprise devrait surtout se faire en fonction de leurs usages, force est de constater qu’il reste étroitement lié à la fiscalité qui pèse lourdement sur cet actif. Une fiscalité qui ne profite toujours pas aux voitures essence et devient de moins en moins avantageuse pour les hybrides.
Aujourd’hui, le coût global d’un véhicule se calcule à partir de son prix mais également des coûts d’entretien courants, de la consommation de carburant annoncée par le constructeur, la fiscalité et les charges sociales, les frais financiers, la valeur de revente ou, encore, l’assurance. Ces différents éléments permettent de déterminer un coût d’usage prévisionnel du véhicule en fonction d’éléments connus ou évalués au départ. En revanche, il ne prend en compte ni l’influence de la conduite du conducteur sur les coûts, ni les frais de gestion administrative d’une flotte, ni encore les évolutions réglementaires, liées notamment à la fiscalité.
Pourtant, selon l’Observatoire du véhicule d’entreprise (OVE), l’entretien pèse en moyenne 8,6 % sur le coût total de détention (TCO, pour «total cost of ownership»), l’énergie 13,5 % et l’assurance 9,8 %. Au total, ces trois composantes représentent 30 % du TCO (source TCO Scope 2015). Un pourcentage sur lequel influe fortement le conducteur. Pour limiter, voire diminuer ces différents coûts, l’entreprise dispose aujourd’hui de différents leviers, dont l’analyse et l’amélioration du comportement de conduite des conducteurs. A partir de plans d’actions, de formations et d’un suivi rigoureux du comportement de conduite des conducteurs, les entreprises peuvent diminuer significativement les coûts inhérents à la consommation de carburant, à l’entretien et à la réparation des véhicules et, enfin, à la sinistralité (assurance, remplacement de personnes en accidents de travail, perte d’exploitation liée à l’immobilisation de véhicules…). Autre composante du TCO à surveiller de près : la fiscalité. Une surveillance d’autant plus nécessaire que la législation en la matière évolue chaque année et que ce poste pèse parfois jusqu’à plus de 10 % dans le TCO. La fiscalité est d’ailleurs souvent un critère de choix des motorisations et des énergies. Pour preuve, la part toujours très importante qu’occupent les véhicules diesel dans les entreprises.
Omniprésence du diesel dans les parcs automobiles d’entreprise
Sur le marché du véhicule d’entreprise, après la chute de la part du marché diesel enregistrée début 2015, la situation s’est stabilisée sur le reste de l’année. L’OVE souligne même une légère accélération des ventes de véhicules diesel au dernier trimestre 2015, avec une progression de 1,1 % à fin octobre, 2,2 % à fin novembre et 3,8 % à fin décembre. Une accélération qui se poursuit depuis le début de cette année (+ 10,3 % sur les ventes des véhicules particuliers et véhicules utilitaires sur les deux premiers mois de 2016). Ces chiffres sont la preuve que les modèles diesel restent appréciés des gestionnaires de flottes, notamment en raison de leurs qualités pour les gros rouleurs (les entreprises parcourent en moyenne 30 000 kilomètres par an). Fin 2015, la part de marché du diesel sur le segment des véhicules particuliers (VP) en entreprises atteignait 80,61 %, et 87,35 % si l’on inclut les véhicules utilitaires (VU). Le diesel, autrefois énergie incontestée dans les entreprises en raison notamment d’une fiscalité avantageuse, cède néanmoins du terrain mois après mois. Fin janvier, en incluant les VP et les VU, le diesel représentait 85,22 % des immatriculations. La bascule du marché en faveur des motorisations essence n’est cependant toujours pas d’actualité.
Néanmoins, force est tout de même de constater une forte progression du parc de véhicules essence dans les entreprises. Depuis le début de l’année 2016, les ventes de modèles essence progressent de 27,8 % (VP et VU) pour 11,23 % de part de marché (contre 8,97 % l’année dernière). Sans que les atouts du diesel ne soient contestés au sein des flottes, décisionnaires et conducteurs ont été plus nombreux à faire le choix de l’essence, en particulier pour les véhicules en flotte parcourant moins de 20 000 kilomètres par an. Une tendance qui reste malgré tout bridée par une fiscalité toujours aussi peu favorable aux véhicules essence.
TVA : l’essence reste pénalisée par rapport au diesel
En effet, l’essence ne bénéficie toujours pas du même traitement fiscal que le diesel. La déductibilité partielle de la TVA (80 % pour les VP et 100 % pour les VU) ne s’applique actuellement que sur le diesel, ne laissant par conséquent que peu de choix aux gestionnaires de flottes souhaitant maîtriser leurs dépenses. Certes, l’Assemblée nationale a bien essayé d’étendre cette déductibilité de la TVA aux véhicules essence, en votant, le 5 décembre dernier, un amendement en la matière. Les parlementaires ne l’ont cependant pas retenu lors de la discussion du projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2015. Une nouvelle déroute pour les véhicules essence qui n’empêche cependant pas les constructeurs de continuer à développer leur offre en la matière pour les entreprises, à l’instar de Renault qui déclinera, au cours de l’année 2016, une motorisation essence sur l’ensemble de ses gammes business. Par ailleurs, sur les segments inférieurs, il n’existe plus aujourd’hui d’offres diesel. Pour les remplacer, les constructeurs s’attachent à réduire toujours plus la consommation en carburant de certains de leurs modèles essence. Aujourd’hui, certains véhicules essence sont ainsi proposés à des prix compétitifs par rapport aux diesel. Si les conducteurs roulent moins, ce qui est actuellement le cas, ces véhicules pourraient devenir une véritable alternative au diesel, et ce en dépit de la fiscalité.
Véhicules vertueux : une alternative de moins en moins intéressante
Parallèlement, alors que les bonus écologiques pourraient favoriser les ventes de véhicules vertueux et grignoter aussi des parts de marché au diesel, leur montant continue de s’effriter. Déjà en 2015, le bonus sur les véhicules thermiques émettant entre 61 et 90 grammes de CO2 avait été supprimé. En 2016, ce sont les hybrides et hybrides rechargeables qui pâtissent des nouvelles mesures gouvernementales. Le gouvernement a en effet diminué en 2016 le montant des aides accordées aux hybrides émettant entre 60 g et 110 g de CO2 de 2 000 à 750 euros. Pour les hybrides rechargeables, la baisse du bonus est encore plus significative. Elle est passée de 4 000 euros en 2015 à 1 000 euros au 1er janvier 2016. Les hybrides diesel ne bénéficient pour leur part de plus aucun bonus à l’achat. Seuls les véhicules électriques continuent de bénéficier, cette année, d’un bonus équivalent à celui de l’année dernière, soit 6 300 euros (dans la limite de 27 % du coût d’acquisition).
Fiscalité sur les carburants : les entreprises continuent de subir
Si aucun projet de loi ne permet actuellement la déductibilité de la TVA sur les véhicules essence et que les bonus écologiques continuent de diminuer, en revanche, le gouvernement continue de légiférer en faveur d’une hausse de la fiscalité des carburants… La loi de finances 2016 engage ainsi le rapprochement des tarifs du gazole et de l’essence à partir de 2016. Elle entérine une hausse de la fiscalité d’un centime d’euro par litre de diesel et une baisse d’un centime d’euro sur l’essence, à compter du 1er janvier 2016. Une annonce cependant remise en cause par un article du collectif budgétaire, inséré dans le PLFR pour 2015. Il instaure une hausse de la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) de 1 centime pour le diesel et l’essence SP98 et SP95. En conséquence, le prix de l’essence n’a pas bougé et celui du diesel a été augmenté de 2 centimes d’euro (et non de 1 centime, comme initialement prévu), au 1er janvier 2016. Parallèlement, la taxe carbone (ou contribution climat-énergie), qui impacte aussi le prix des carburants à la pompe et qui a été instaurée en avril 2014, avec une entrée en vigueur au 1er janvier 2016, se traduit, elle, par une hausse de 2 centimes d’euro le litre de diesel et de 1,7 centime pour celui de l’essence. Un montant qui devrait encore augmenter en 2017.
Choix des véhicules : la fiscalité prime encore trop sur les usages
Autant de décisions qui ne sont pas sans conséquences sur le choix des véhicules d’entreprise. Alors que la fiscalité sur le diesel demeure malgré tout la plus favorable, peu importe qu’un véhicule diesel effectue moins de 20 000 kilomètres par an et qu’un modèle essence soit, dans certains cas, plus pertinent : tant que la fiscalité sur l’essence ne sera pas alignée sur celle du diesel, ce dernier continuera d’être favorisé par les entreprises, quels que soient les usages prévus pour les véhicules.
Nouveauté : l’indemnité kilométrique vélo
Depuis le 12 février 2016, l’indemnité kilométrique vélo est devenue une réalité :
• une entreprise qui met des vélos à disposition de ses salariés pour leurs déplacements domicile-lieu de travail peut déduire du montant de son impôt sur les sociétés les frais générés par cette mise à disposition gratuite (dans la limite de 25 % des frais engagés pour l’achat ou l’entretien de la flotte de vélos, y compris s’ils sont électriques) ;
• les salariés, de leur côté, bénéficient d’une indemnité kilométrique (IKV) de 0,25 euro par kilomètre parcouru sur ces mêmes trajets lorsqu’ils sont effectués à vélo ou à vélo à assistance électrique.
Cette indemnité, applicable pour le moment uniquement aux salariés du secteur privé, peut être prise en charge de façon facultative par l’employeur. Elle est par ailleurs cumulable avec le remboursement des abonnements transports pour les trajets de rabattement vers des arrêts de transport public :
• pour l’employeur, cette participation à l’indemnité vélo est exonérée de cotisations sociales, dans la limite de 200 euros par an et par salarié, et sur la base des kilomètres parcourus par les salariés pour se rendre à leur travail. Si l’employeur verse au-delà de ce plafond annuel, il doit payer des cotisations sociales sur la part dépassant le plafond ;
• pour le salarié, l’indemnité kilométrique est exonérée d’impôt sur le revenu, comme c’est déjà le cas pour la contribution de l’employeur aux frais de transport en commun des salariés ou d’abonnement à des services publics de location de vélos. Toutefois, cette exonération est limitée pour l’IKV à 200 euros par an.
La fiscalité sur les véhicules d’entreprise comprend :
- Le carburant ;
- la TVA sur l’essence ;
- le bonus écologique ;
- le malus écologique ;
- la taxe sur les véhicules de société ;
- le plafonnement des amortissements des voitures particulières ;
- la carte grise ;
- le régime fiscal des plus et moins-values de cession ;
- la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation pour les véhicules d’occasion.
Source : OVE
Taxe sur les véhicules des sociétés
Les entreprises doivent chaque année déclarer les voitures particulières qu’elles possèdent et s’acquitter de la taxe sur les véhicules des sociétés (TVS). Le montant de cette taxe annuelle s’établit en fonction de deux composantes :
• la première repose sur un tarif en fonction soit du taux d’émission de CO2, soit de la puissance fiscale (selon la date de mise en circulation du véhicule) ;
• la seconde est basée sur les émissions de polluants atmosphériques, déterminée en fonction du type de carburant. Les voitures récentes de 2015 ou de 2016, en principe les moins polluantes du parc automobile français, sont donc avantagées fiscalement (la taxe pour les véhicules polluants peut dépasser 7 370 euros, dont 600 euros au titre de la seconde composante).
Source : AAA-Data, retraitement OVE