La maîtrise des coûts demeure, certes, l’une des principales préoccupations des gestionnaires de flotte. Néanmoins, les services proposés par les prestataires de ce marché aux responsables de parc comme aux conducteurs font aussi, aujourd’hui, l’objet de toutes les attentions. En effet, au-delà de faciliter les process de gestion de la flotte, ils contribuent également à renforcer la sécurité et le confort des conducteurs, tout en participant à la baisse du coût total de possession des véhicules (TCO).
- Les besoins des gestionnaires de parc
- Des conseils sur la car policy
- Choix du véhicule : l’usage prend le pas sur le coût
- Des services après-vente plus proactifs et qualitatifs
- Les technologies digitales au service du conducteur
- Influer le comportement de conduite avec la télématique embarquée
- Optimiser la gestion des amendes
Les besoins des gestionnaires de parc
Laurent Jolivet, président de l’ARFA (Association des responsables de flotte automobile) et responsable du parc automobile du groupe EIFFAGE : Généralement, les flottes automobiles sont rattachées à des directions achats ou financières. Or, une fois balayé le scope achat lié à ce poste, la vraie différence entre les fournisseurs et les prestataires de ce marché se fera sur les services qu’ils proposent, l’accompagnement qu’ils délivrent, les conseils qu’ils prodiguent. L’objectif du gestionnaire de parc consistera alors, à travers ces services, à s’affranchir autant que possible de tous les problèmes pouvant être liés à sa flotte sans pour autant occulter la dimension économique.
A cet effet, il recherchera avant tout des prestations propres à lui faciliter son travail de gestion au quotidien, de l’innovation, des conseils pour gérer ses coûts ou encore un accompagnement et une sécurisation de ses conducteurs. C’est d’ailleurs ainsi que les fournisseurs de ce marché sont peu à peu devenus de véritables partenaires des gestionnaires de parc. Leurs échanges ne sont plus uniquement articulés autour du seul critère de la rentabilité, mais aussi de la qualité des services attendus et rendus.
Emmanuel Nedelec, directeur général France & Benelux d’Ubeeqo : Les gestionnaires de parc ont besoin que nous leur proposions des solutions améliorant leurs relations et leurs échanges avec leurs conducteurs qui, d’ailleurs, cherchent aussi à être accompagnés. Les directeurs achats et financiers auront pour leur part besoin de conseils davantage articulés autour de la baisse des coûts et de solutions innovantes pour les mettre en œuvre. Au-delà de la relation avec leurs prestataires, les gestionnaires de flottes sont également de plus en plus attentifs aux services que nous leur proposons pour traiter les déplacements des collaborateurs dans leur ensemble. Ils vont nous challenger et nous demander des conseils sur le passage du TCO vers le coût total de la mobilité, à savoir le TCM.
Guillaume Maureau, directeur général adjoint en charge du commerce d’ALD Automotive France : Il est vrai qu’à présent nos clients «entreprises» ont plusieurs visages : le responsable de parc entend se décharger de certaines missions auprès de nos équipes pour améliorer et simplifier ses processus de gestion. Les conducteurs attendent de nous que nous leur apportions un certain nombre de services. Les directions financières et comptables souhaitent un accompagnement notamment articulé autour des systèmes d’information, de la dématérialisation des factures et de l’adaptation continue des flux clients. Nous nous devons également d’accompagner dans le temps les directions achats qui cherchent notamment une garantie en termes de prix. Les RH, pour leur part, ont besoin que nous les aidions sur des sujets tels que la «car policy» ou la mobilité des collaborateurs. Comme les entreprises ont de moins en moins de ressources à consacrer à ces différents sujets, nos prérogatives tendent à évoluer fortement.
Edouard Rance, fondateur et dirigeant d’ERCG : Auparavant, le gestionnaire était plutôt concentré sur des tâches administratives. Il passait beaucoup de temps à réaliser des enregistrements, des reportings et des statistiques. Aujourd’hui, il entend être déchargé autant que possible de ces tâches administratives sans valeur ajoutée, notamment pour consacrer plus de temps aux attentes de reporting de sa direction. Il souhaite également que nous l’aidions à gagner en efficacité dans ses processus de gestion. Il met par ailleurs de plus en plus en avant la satisfaction de ses conducteurs.
Laurent Jolivet : Ces dernières années, l’attention portée aux collaborateurs a pris de l’importance. D’ailleurs, avec les technologies actuelles telles que les smartphones il est devenu plus simple de s’inscrire dans cette démarche. Elle est d’autant plus importante pour un gestionnaire de parc que le conducteur impacte fortement le TCO. Or, aujourd’hui, beaucoup d’entreprises maîtrisent l’ensemble des éléments de leur TCO flotte, sauf les variables liées aux conducteurs. C’est la raison pour laquelle elles s’y intéressent de plus en plus. Mais pour que le conducteur impacte positivement le TCO, il est nécessaire de l’impliquer.
Guillaume Maureau : Rappelons à ce sujet que le conducteur détient entre ses mains pas loin de 25 % du TCO, son comportement de conduite ayant des conséquences sur la consommation de carburant et le coût de l’assurance.
Des conseils sur la car policy
Emmanuel Foreau, directeur commercial Leaseplan : Les gestionnaires de flottes veulent notamment être conseillés pour définir leur politique automobile, trouver un compromis entre l’image écologique de l’entreprise, le choix des véhicules et la typologie de services mis à leur disposition. Il s’agit pour eux de mettre en place une car policy économiquement viable sans pour autant dégrader la typologie de véhicules mis à la disposition de leurs collaborateurs.
Edouard Rance : Toute la difficulté pour le gestionnaire de parc consiste également à mettre en place une politique d’achat efficace sans pour autant passer trop de temps dessus. De plus en plus, les grandes entreprises font le choix de stratégies multifournisseurs en matière de flotte automobile. Il est donc important de savoir mettre en concurrence et manager ces différents fournisseurs. Or ces processus sont parfois longs et complexes. Les entreprises attendent donc de la part de leur prestataire de gestion de flotte des conseils en termes de process ainsi que des outils, notamment pour mettre en concurrence leurs fournisseurs. La gestion du contrat n’est pas la charge la plus importante car elle est répartie dans le temps. Le plus gros de sa charge porte sur la gestion des commandes et des restitutions.
Jean-Marc Prince, directeur Volkswagen Group Fleet Solutions : Nous constatons également que les personnes en charge de la gestion des flottes automobiles ont besoin d‘être rassurées aussi bien dans le choix des véhicules que dans les services que nous leur prodiguons. Un besoin exprimé par toutes les entreprises, quelle que soit leur taille. Or, la capillarité du réseau constructeur est l’un des éléments propres à les rassurer. Lorsqu’elles font le choix d’un constructeur, elles s’interrogent de plus en plus sur son réseau et ses capacités à délivrer des services de qualité à ses conducteurs, notamment en cas de problème sur leurs véhicules. Toute notre valeur ajoutée repose sur notre capacité à proposer aux entreprises des véhicules adaptés aux besoins de leurs collaborateurs et un réseau pouvant accompagner leurs conducteurs en termes de services, notamment de proximité. Il est également important de se pencher sur le profil client.
Nous parlons beaucoup des grandes entreprises et de gestionnaires de parc. Cependant, les entreprises de taille intermédiaire représentent également une part très importante de notre activité. Ces dernières ne feront pas toujours appel à des fleeteurs. Or leurs exigences et leurs besoins en matière d’information, même si elles n’ont que trois ou quatre véhicules en parc, sont de plus en plus importants. Nous parlons alors de mobilité clients. Face à cette notion de mobilité, notre rôle consiste à offrir des services leur évitant toute rupture dans la chaîne de travail. Au-delà du véhicule de remplacement, nous devons donc être en capacité de mettre à leur disposition des bureaux dans notre réseau ou une connexion wi-fi pour que les conducteurs puissent continuer à travailler pendant la durée de l’entretien de leur véhicule. Ce sont des services innovants mais qui rassurent certains clients. Nous avons donc, d’une part, les gestionnaires de parc des très grands comptes dont nous devons faciliter la vie, et, d’autre part, la motivation des conducteurs à qui nous devons proposer des véhicules valorisants et des services de proximité.
Guillaume Maureau : Certes, 1,5 million de véhicules sont en LLD, mais nous avons aussi près de 5 millions de véhicules utilisés à des fins professionnelles par des entreprises de toutes tailles et des indépendants. Or les attentes des uns et des autres ne sont pas les mêmes et il nous revient de leur proposer des services adaptés.
Edouard Rance : En amont des contrats et des notions de process, les entreprises attendent également des informations sur le marché : quels sont les véhicules qui existent ? Quelles sont les nouvelles tendances, les nouvelles technologies, les nouveaux services ? Il est de notre responsabilité à tous d’informer les entreprises sur l’offre du marché aussi bien en termes de véhicules que de prestations. S’il y a plus de dix ans il était encore facile de connaître les véhicules et les gammes, aujourd’hui l’offre s’est tellement étendue que la démarche est devenue beaucoup plus compliquée. Par exemple, des prestataires comme Ubeeqo n’existaient pas. C’est la raison pour laquelle les entreprises ont plus que jamais besoin que nous leur apportions une connaissance et des informations sur les offres qui existent et qui sont en mesure de répondre à leurs besoins.
Laurent Jolivet : Depuis une dizaine d’années maintenant, les constructeurs ont créé leur gamme business. Ces gammes se sont largement étendues et permettent aujourd’hui au gestionnaire de parc de trouver le «package» de base qui correspondra à ses attentes. Cependant, concernant l’image véhiculée par l’automobile, la perception des entreprises est en train de muter. Aujourd’hui, les entreprises sont beaucoup moins regardantes sur le choix du véhicule mais le sont davantage sur ses fonctionnalités. Les nouvelles générations de conducteurs veulent un véhicule bien équipé et fonctionnel plutôt qu’un véhicule de standing.
Jean-Marc Prince : Les gammes business ont permis de rationaliser le débat sur ce sujet du choix des véhicules. Elles disposent en effet en standard et pour la plupart du minimum d’équipements attendus par les gestionnaires de parc et leurs conducteurs. En revanche, l’image que peut véhiculer une voiture demeure un sujet important.
Edouard Rance : Certes, mais ce n’est plus aujourd’hui un critère de décision important pour le choix du véhicule.
Jean-Marc Prince : Tout dépend de l’entreprise.
Choix du véhicule : l’usage prend le pas sur le coût
Emmanuel Nedelec : Nous rencontrons aussi des gestionnaires de parc qui nous demandent de les aider à construire leur car policy en fonction des besoins des collaborateurs. De nombreux cadres ne comprennent plus pourquoi leur entreprise leur propose des véhicules «Premium» qui ne correspondent en rien à leurs usages. Ils nous demandent donc comment passer d’une car policy classique à une car policy moderne prenant en compte la notion de mobilité des collaborateurs. Nous rencontrons beaucoup de collaborateurs d’entreprises qui, en semaine, préfèrent rouler en Renault Twingo et le week-end retrouver une Audi A4 Break en province pour partir avec leurs enfants. Par ailleurs, si certaines directions financières attendent de leur fleeteur et loueur de les accompagner dans l’optimisation de leurs coûts, en tant qu’acheteurs, ils nous expriment aussi leurs difficultés à connaître les usages des véhicules de leur parc. Rappelons qu’avant d’optimiser un actif tel que le véhicule, il est important de savoir dans quelle mesure il est utilisé. Il s’agit d’un sujet en train d’émerger sur ce marché.
Guillaume Maureau : Concernant les véhicules électriques (VE), nous avons le projet de communiquer sur les avantages qu’ils procurent, comme la possibilité de rouler dans Paris intra-muros ainsi que l’avantage du parking gratuit, plutôt que de communiquer sur ses éléments techniques.
Edouard Rance : Les entreprises ne veulent plus proposer des voitures dont le coût fiscal et le coût de location sont élevés à des collaborateurs qui ne s’en servent pas. Elles préfèrent leur payer une carte de transports en commun ou mettre à leur disposition un véhicule électrique ou un budget déplacement.
Emmanuel Nedelec : Il ne faut pas oublier que beaucoup d’entreprises ont actuellement des problématiques de recrutement et cherchent à être attractives, notamment auprès des jeunes générations. Il s’agit d’une mouvance à laquelle les entreprises sont aujourd’hui obligées de faire face.
Edouard Rance : Avant, pour attirer des compétences et des talents y compris sur des postes sédentaires, les entreprises proposaient des véhicules. Aujourd’hui, nous ne sommes plus dans cette mouvance-là. Les jeunes générations attendent d’autres types de services autour de la mobilité.
Guillaume Maureau : Dans le cadre des nouvelles tendances, nous avons lancé il y a quelques années une solution ALD 7 Wheels, qui permet de souscrire à un véhicule plus petit plus une moto 3 roues pour un TCO équivalent à un Espace ou une berline allemande de type A6, Série 5. Cette offre très séduisante aux yeux des DRH apporte une véritable alternative aux car policies traditionnelles.
Edouard Rance : De plus en plus de collaborateurs préfèrent aujourd’hui disposer d’un petit véhicule avec un budget mobilité plutôt que d’un gros véhicule dont ils n’ont pas vraiment l’utilité. Les entreprises ont besoin d’être conseillées sur ce sujet.
Des services après-vente plus proactifs et qualitatifs
Emmanuel Foreau : Les entreprises attendent également de leur loueur qu’il s’assure de façon proactive que les opérations d’entretien se passent bien, de manière à éviter, par exemple, une casse moteur. A nous de leur fournir des informations et d’anticiper sur l’entretien des véhicules. Par ailleurs, elles souhaitent également que nous accompagnions leurs collaborateurs dans ce sens-là. Dans le passé, le conducteur attendait que des voyants s’affichent sur son tableau de bord pour emmener son véhicule en entretien. Aujourd’hui, les entreprises veulent que nous anticipions ces échéances en fournissant directement et par anticipation des informations aux conducteurs. Une démarche dans laquelle, en qualité de loueur, nous nous sommes engagés. Nous allons au-devant des conducteurs pour leur fournir ces informations mais aussi des services complémentaires tels que le «booking» d’entretien : plutôt que d’attendre que le conducteur aille lui-même vers son réseau d’entretien, le loueur le contacte pour l’informer qu’il a un entretien à réaliser et prend rendez-vous à sa place. A cet effet, chez Leaseplan, nous nous appuyons sur le réseau constructeur et nous attachons à identifier les prestataires offrant une certaine capacité d’accueil ou des prestations complémentaires, telles que les espaces de travail.
Laurent Jolivet : Nous assistons à un vrai changement culturel sur tout ce qui concerne l’après-vente. Il y a quelques années, lorsque nous emmenions un collaborateur dans un réseau d’après-vente, quelle que soit la marque, il y avait tout type d’accueil, de solutions et de compétences. Or, aujourd’hui, ces réseaux ont largement évolué. Désormais, quelles que soient les marques de constructeurs, la qualité des services proposés par leur réseau est largement montée en puissance. Nous avons ainsi vu apparaître et se développer des normes qualité sur les produits, qui désormais limitent les casses ou les anomalies techniques sur les véhicules. Cette démarche diminue donc les retours après-vente. Les constructeurs se sont également largement adaptés et améliorés en matière d’accueil client, de prise de rendez-vous, de capacité à répondre rapidement aux entreprises. Ce dernier service est notamment important pour les artisans ou les collaborateurs dont le véhicule est un outil de production.
Les collaborateurs sont d’ailleurs particulièrement demandeurs de services favorisant leur mobilité dans leur travail, tels que les espaces de travail, le wi-fi, etc. Ils apprécient également que les concessionnaires viennent récupérer le véhicule directement sur leur lieu de travail. Si les collaborateurs sont parfois surpris par ces prestations qu’ils pensent réservées à leurs directions, il s’agit aujourd’hui d’une réalité. Techniquement, tous les constructeurs se sont mis en ordre de marche pour délivrer ces services et éviter aux conducteurs de perdre du temps.
Guillaume Maureau : Il y a également de nombreux nouveaux usages. Nous le voyons au travers des prestations que nous avons développées à domicile (sur le lieu de travail ou au domicile du collaborateur) et portant par exemple sur les pneumatiques, le nettoyage ou la petite vitrerie qui actuellement se développent de manière considérable. Dès lors que nous proposons, notamment via notre application mobile ou sur la plateforme téléphonique, le choix du lieu pour délivrer cette prestation, nous constatons que de plus en plus de collaborateurs optent pour une intervention à domicile. Apporter du service de gestion de parc, c’est donc aussi faciliter la vie du conducteur et lui faire gagner du temps. Changer un pneumatique dans une concession ou un réseau agréé est plus complexe et plus long que faire venir un prestataire à domicile ou sur son lieu de travail.
Emmanuel Foreau : Sur la partie après-vente, les réseaux ont également fortement progressé. En revanche, la qualité de services reste hétérogène d’un prestataire à l’autre. Et, en ce sens, les loueurs ont un rôle important à jouer dans l’animation et la coordination des réseaux d’entretien pour les pousser à des standards et diriger les conducteurs vers les meilleurs d’entre eux en termes de qualité de services. En dehors de l’entretien, la monte des pneumatiques est également un service important, et ce d’autant plus qu’il se fait à échéances fréquentes mais également variables, sauf en ce qui concerne la permutation des pneumatiques hiver. Nous avons, en qualité de loueur, progressé sur le sujet. Par exemple, il y a trois ans, nous nous sommes retrouvés avec des conducteurs bloqués dans des centres de montage parce que nous n’avions pas suffisamment anticipé cette permutation des pneus hiver. Depuis, nous faisons des campagnes proactives auprès de nos clients.
Dès le mois de septembre, nous identifions les véhicules sur lesquels nous devrons intervenir, nous commandons les pneumatiques et nous assurons qu’ils seront disponibles dans les centres de montage lorsque le conducteur en aura besoin et lui proposons de prendre rendez-vous. Si nous ne le faisons pas, le conducteur attend les premiers flocons de neige, se présente dans les centres de montage au dernier moment avec le risque de ne pas trouver les bons pneumatiques au bon endroit. Notre rôle consiste donc à coordonner l’ensemble de ces prestations. Il faut être dans l’anticipation plutôt que dans la réaction.
Guillaume Maureau : Sur la partie après-vente, les constructeurs doivent s’adapter aux nouveaux modes de consommation et aux nouvelles générations. S’ils veulent vendre plus de pneus demain, ils devront être en mesure d’apporter ce service là où il est demandé et pas forcément attendre que le client vienne en concession.
Jean-Marc Prince : En qualité de constructeur, nous sommes partie prenante dans la chaîne de valeur du client. Dans cette chaîne, il n’y a rien de mieux que le réseau d’un constructeur. C’est par exemple lui qui fera le meilleur diagnostic sur la voiture. C’est la raison pour laquelle nous avons un important travail de sensibilisation de nos réseaux à faire sur les attentes du marché des entreprises et des professionnels. L’une de nos missions consiste à former nos réseaux sur ce sujet.
Edouard Rance : Il y a une vraie volonté de services de la part des prestataires. Cependant, il ne faut pas confondre assistanat et service. Il ne doit pas revenir au partenaire ou au fournisseur d’informer le collaborateur sur une date d’entretien. Le véhicule en lui-même dispose depuis plusieurs années des équipements nécessaires pour alerter le conducteur d’une anomalie ou de la nécessité de l’envoyer en entretien.
Les technologies digitales au service du conducteur
Emmanuel Nedelec : Nous nous adaptons à ce que veulent les clients. A partir du moment où l’information est disponible, pourquoi ne pas leur fournir simplement ce service ? Aujourd’hui, les technologies telles que la télématique embarquée, les mails ou encore les SMS nous permettent par exemple de connaître en temps réel le kilométrage d’un véhicule et de communiquer avec le conducteur. Nous sommes donc en mesure de l’alerter sur la nécessité de faire un entretien.
Edouard Rance : Nous avons certes un rôle de donneur d’informations, mais également de conseil, afin de limiter la déresponsabilisation du conducteur. Il doit aussi s’impliquer dans le suivi de son véhicule.
Emmanuel Nedelec : Certes, mais n’oublions pas que, en raison de leur travail, les collaborateurs n’ont pas toujours le temps d’assurer ce suivi ou de vérifier la pression de leurs pneus. D’ailleurs, de plus en plus d’entreprises nous demandent de les aider à assurer la sécurité de leurs collaborateurs en délivrant cette prestation de suivi de leurs véhicules.
Jean-Marc Prince : Aujourd’hui, la technologie de nos voitures a évolué et nous ne pouvons plus dire que la révision du véhicule se fait tous les 15 000 ou tous les 30 000 km. Cette technologie, et notamment la télématique embarquée, alertera par exemple le conducteur sur la période à laquelle réaliser l’entretien du véhicule en fonction de son usage. Certains devront réaliser cet entretien à 10 000 km, d’autres à 30 000 km : tout dépendra de l’usage qu’ils font de leur voiture.
Guillaume Maureau : Notre valeur ajoutée consiste d’ailleurs aujourd’hui à conseiller aux entreprises d’opter pour des véhicules dotés de ces technologies.
Jean-Marc Prince : La donnée kilométrique est un élément important. Elle permet par exemple de réajuster les termes d’un contrat en fonction des kilomètres roulés. Ces technologies permettent également de remonter des données et des alertes sur le véhicule. Nous pouvons alors développer du service autour de ces données, anticiper sur les commandes de pièces de manière à garantir durablement la mobilité du collaborateur. Assurer cette mobilité, c’est devancer une problématique, commander des pièces et faire en sorte de lui assurer, lorsqu’il vient en concession, une prise en charge rapide de son véhicule, si nécessaire un espace de travail, voire un véhicule de prêt.
Laurent Jolivet : Dans le cas des poids lourds et des transporteurs, une immobilisation coûte extrêmement cher. Il était important d’adapter les services à cette population. Cette démarche a été mise en place il y a très longtemps maintenant pour cette activité qui dispose depuis d’un service client adapté. Par exemple, les prestataires de ce marché regardaient les huiles clients pour jauger à quel moment il fallait faire la vidange. Ce service client était précurseur en la matière, notamment par rapport à l’automobile traditionnelle.
Aujourd’hui, la technologie a révolutionné l’enjeu autour des services même si, certes, le curseur est complexe à placer entre l’assistanat et les engagements des collaborateurs. Il faut, à ce titre, s’adapter à son époque. La télématique est un moyen de disposer de l’information et de données kilométriques fiables. Le vrai débat que se posent désormais les gestionnaires porte sur la data. Ne va-t-elle pas être trop importante ? Ne va-t-elle pas être utilisée à des fins autres que techniques ? A qui appartient la data ?
Jean-Marc Prince : A nous, prestataires de ce marché, de voir comment nous pouvons construire une offre de services, notamment grâce à ces données. Prenons l’exemple des gestionnaires de parc. Ils se servent de la donnée pour gérer leur parc. Les données kilométriques leur permettent d’adapter leurs contrats en fonction du roulage du véhicule ou encore de mettre en place des incentives ou des stages d’éco-conduite pour diminuer la consommation de carburant. Pour accompagner la mobilité du conducteur, ils auront également besoin d’être rassurés sur le service que les prestataires sont en mesure de leur fournir, notamment en termes de suivi de l’entretien de leurs véhicules en parc. Or, pour leur délivrer ce service, ces prestataires s’appuient aussi sur de la donnée.
Guillaume Maureau : A cette fin, les loueurs sont en phase de mutation. En 1990, notre seule préoccupation était la voiture. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas et, dans dix ans, notre principale préoccupation sera le conducteur, avant l’automobile. Par exemple, lorsqu’un conducteur a un accident, notre problème ne porte pas tant sur comment nous allons faire réparer le véhicule mais davantage sur comment nous allons communiquer au conducteur le point de réparation le plus proche de lui, quand le véhicule sera prêt et aussi comment est gérée la mobilité du conducteur pendant l’immobilisation de son véhicule.
Influer le comportement de conduite avec la télématique embarquée
Emmanuel Nedelec : Pour gérer une voiture, le kilométrage est une donnée essentielle. Dans ce cadre, la télématique va aussi permettre d’optimiser tout ce qui est process traditionnel de gestion de flotte. Nous parlons alors juste de remontées du kilométrage. Prenons l’exemple du conducteur qui représente 25 à 30 % du coût du véhicule par sa consommation carburant, les frais de remise en état, etc. A ce titre, il est important que le gestionnaire de parc le place au centre de ses préoccupations. Les boîtiers télématiques permettent de les accompagner dans cette démarche, notamment en contribuant à l’amélioration du comportement de conduite des conducteurs. En effet, nous avons déjà prouvé qu’une formation one-shot d’un conducteur peut avoir un impact sur son comportement de conduite, mais uniquement quelques semaines. En revanche, lui envoyer régulièrement sur son smartphone des informations sur son comportement de conduite peut l’influer positivement et diminuer durablement sa consommation de carburant.
Enfin, l’analyse du roulage du véhicule est particulièrement importante pour les directions achats et financières. A partir de ces analyses, articulées autour des données des véhicules, elles disposent d’éléments justifiant l’intérêt de solutions alternatives comme, par exemple, la mise en «pool» de certains véhicules, les crédits mobilité, les véhicules électriques. Toutes ces démarches sont ainsi réalisables grâce aux données remontées par ces boîtiers télématiques, que nous proposons de traiter. Ce n’est pas tant la donnée qui est importante ici, mais sa transmission à des logiciels qui la traiteront pour aider le responsable de parc à optimiser la gestion de sa flotte. Il est davantage important de se pencher sur la façon dont sera traitée la donnée que sur la donnée en elle-même.
Edouard Rance : Certes, les gestionnaires veulent avoir de la donnée, mais surtout un outil qui puisse la traiter automatiquement et favoriser la communication avec les conducteurs, et ce d’autant plus lorsqu’ils sont nombreux. Les gestionnaires attendent donc d’avoir des outils de gestion pour évoluer et s’adapter à ces nouvelles technologies.
Emmanuel Foreau : Il existe un certain nombre de coûts variables qui impactent le TCO de l’entreprise. Les gestionnaires de parc ont donc besoin d’outils pour attaquer ces coûts variables tels que la consommation de carburant, l’optimisation des tournées, etc. Ils attendent également de tiers comme le loueur que nous soyons en mesure de coordonner ça, pourquoi pas en leur nom, au travers par exemple de challenges ludiques dont l’objectif serait d’améliorer les comportements de conduite. En procédant ainsi, ce n’est plus l’employeur qui est perçu comme le «gendarme», mais un tiers qui accompagne et sensibilise le conducteur par rapport à ces sujets-là.
Emmanuel Nedelec : Cette notion de «gamification» est très importante. Elle représente pour l’entreprise une véritable opportunité de voir enfin sa facture flotte diminuer grâce à la consommation carburant. Pourquoi d’ailleurs ne pas rétribuer les bons comportements de conduite de manière à les encourager. Comme les entreprises n’ont pas le temps de mettre en place ce type de process, elles ont besoin du conseil et des outils que peuvent leur apporter des prestataires spécialisés.
Jean-Marc Prince : Lorsque nous parlons de télématique, il s’agit d’un sujet très vague. Aujourd’hui, pratiquement tous les véhicules disposent de systèmes pour réduire la consommation de carburant. Toute la technologie que nous apporterons dans la voiture sera essentiellement de l’assistance aux conducteurs. Tout l’enjeu consiste donc à sensibiliser davantage le collaborateur. Faut-il remonter de la donnée pour que le responsable de parc l’alerte sur son niveau de consommation ? La technologie est là pour aider le gestionnaire de parc. Mais pour servir cette cause, il est important que le constructeur intègre et s’appuie sur ces nouvelles technologies et les adapte aux évolutions à venir en la matière. Il est également important de se pencher sur toute l’assistance que nous sommes en mesure d’amener au conducteur. Or, il peut y avoir un décalage de connaissance entre la technologie dans les voitures et la connaissance des responsables de flotte et des conducteurs de cette technologie. Par exemple, nous ne savons pas si les conducteurs utilisent ou non l’assistance à la conduite qui pourrait leur permettre de diminuer leur consommation de carburant. Motiver les conducteurs sur la baisse de la consommation de carburant les sensibilisera à cette problématique.
Edouard Rance : Nous faisons beaucoup plus de propositions d’actions de communication et de sensibilisation qu’il y a encore quelques années et ce pour la simple raison que, désormais, les gestionnaires de parc disposent d’un outil informatique qui les décharge autant que possible des tâches administratives. Par ailleurs, ces outils favorisent la communication automatique et donc la sensibilisation des collaborateurs sur certains sujets tels que la consommation.
Jean-Marc Prince : Grâce à la télématique embarquée, nous pouvons aussi faciliter la vie d’une personne qui utilise un véhicule à usage personnel et à usage professionnel sur ses déclarations. Il lui suffit en effet de déclarer, lorsqu’elle rentre dans la voiture, si elle va rouler à titre personnel ou à titre professionnel. Nous lui envoyons ensuite une fiche récapitulative pour ses déclarations fiscales. A travers ce service, nous sommes toujours dans la même logique d’assurer la mobilité du travail. Tout le travail du constructeur aujourd’hui consiste à proposer de tels services innovants tout en s’adaptant aux évolutions technologiques, qui sont de plus en plus rapides.
Optimiser la gestion des amendes
Emmanuel Foreau : La gestion des amendes est également un vrai sujet pour les entreprises car leur volume s’est décuplé ces dernières années. Or, traiter une amende prend quinze à vingt minutes de bout en bout avec des process qui sont souvent très manuels, archaïques, chronophages et difficiles à tracer. Derrière une amende, il ne faut pas oublier que l’entreprise, et en particulier son mandataire, a une responsabilité sociale. Nous avons développé un service pour gérer ce sujet.
Guillaume Maureau : Nous constatons que les entreprises ont eu tendance à repousser cette gestion des amendes auprès des gestionnaires de flotte, tels qu’ALD. Dans la prestation de gestion des amendes automatisées que nous proposons depuis un an, nous avons mis en place un lien électronique avec l’Agence nationale de traitement informatisé des infractions. Lorsqu’un PV est signalé, nous le déclarons sur notre extranet dédié. L’entreprise dispose alors d’un délai pour désigner le conducteur. Il revient ensuite à ce dernier de traiter son amende. Tous les mois, nous communiquons à l’entreprise via notre extranet de gestion un reporting et des statistiques de tout ce qui s’est passé pendant les trente derniers jours au sujet de ces amendes. Nous pouvons ensuite, sur la base de ces données, mettre en œuvre des politiques de sensibilisation, voire des sanctions. Il s’agit d’un service de plus en plus plébiscité par les entreprises. D’ailleurs, nous avons déjà plus de 50 clients grands comptes actuellement intéressés par cette offre.
Emmanuel Foreau : Ces informations sont également intéressantes pour analyser le comportement de conduite du collaborateur. Une amende peut par exemple porter sur un excès de vitesse. Or, la vitesse est consommatrice de carburant et/ou cause d’accidents. Elle peut donc impacter le TCO.
Guillaume Maureau : Il n’est pas rare de constater que le conducteur qui a le plus d’amendes présente régulièrement le TCO /TCM (y compris consommation de carburant et sinistres) le plus élevé.
Edouard Rance : L’an passé, nous avons géré 33 000 amendes. Une des phases importantes de la gestion des amendes consiste à identifier le véhicule et son conducteur au moment des faits. Derrière, il est donc important d’avoir une historisation des affectations des véhicules.
Emmanuel Nedelec : Sur les flottes en autopartage, grâce à la télématique embarquée et à notre système de réservation et de gestion du véhicule, cette étape est très simple à réaliser car nous savons qui occupe quel véhicule à tout moment.
Edouard Rance : Il y a trois ans, 35 % des entreprises faisaient des requêtes en exonération, donc désignaient leur conducteur, et 65 % renvoyaient les amendes aux conducteurs, qui devaient alors la régler de façon anonyme. Aujourd’hui, la tendance s’est plutôt inversée. En revanche, il faut tout de même identifier le conducteur pour lui transmettre l’amende et vérifier qu’il la règle bien. Nous sommes donc encore sur des process relativement lourds et chronophages pour les entreprises.
Laurent Jolivet : Le gestionnaire de parc est un vrai couteau suisse. Il faut qu’il sache toucher à tout et qu’il connaisse toutes les évolutions de toutes les actualités. Par exemple, sur les PV, il y a des choses qu’il est possible de faire et d’autres non. Le gestionnaire doit le savoir et s’adapter en conséquence. S’il désigne quelqu’un, il faut avoir une trace d’informations, et donc des entrées auprès de la RH. Sans compter que, en effet, la gestion des PV est chronophage et longue à réaliser. Il s’agit d’ailleurs d’une activité exponentielle sur les grandes agglomérations. Certes, les loueurs ont apporté sur ce sujet un service complémentaire et déchargent les gestionnaires de flottes de tâches redondantes. Cependant, il faut aussi que les grandes entreprises s’organisent pour avoir une meilleure fluidité sur les informations des collaborateurs. Si la démarche n’est pas trop compliquée sur les véhicules de fonction, hormis les véhicules de pool, ce n’est en revanche pas forcément le cas sur les véhicules utilitaires mutualisés sur les sites. Au niveau de l’ARFA, nous constatons qu’il s’agit d’un vrai problème d’actualité.
Guillaume Maureau : Le coût et les process de gestion d’une amende sont identiques quels qu’en soient la raison et le montant.
Laurent Jolivet : En matière de gestion des amendes, en premier lieu, il convient que le gestionnaire de flotte définisse la politique de l’entreprise en termes de traitement : désigne-t-elle ou non le conducteur ? Ensuite, il enregistre l’amende. Si certaines personnes sont verbalisées de manière récurrente, il pourra mettre en place des actions pour les sensibiliser sur le sujet. Mais n’oublions pas que la gestion des amendes ne représente que l’un des volets des gestionnaires de parc. Nous avons par exemple évoqué le sujet de la TVS ou des services aux collaborateurs.
D’autres nouveautés arrivent, telles que la mobilité. Les nouvelles générations, par exemple, n’ont que faire du véhicule, qui est plus perçu comme une contrainte qu’un avantage. Il est indispensable que l’entreprise prenne le virage de la mobilité pour satisfaire les besoins de ces collaborateurs. Enfin, sur le cas de la télématique, que puis-je faire ou pas, ai-je un outil informatique ? Le gestionnaire de parc n’est pas informaticien et ne dispose pas toujours d’un outil de gestion de parc qui, pourtant, est un élément de base. Il faut faire comprendre au gestionnaire de parc la valeur ajoutée de l’informatique dans la gestion quotidienne de son activité. Si les constructeurs et les loueurs sont assez au fait des évolutions technologiques, le gestionnaire de parc doit également les prendre en compte pour faciliter son quotidien. Or, l’enjeu réside sur leur capacité à s’adapter à ces nouvelles technologies et ces environnements qui évoluent très vite.
L’indispensable mise
en main des services
Emmanuel Foreau : Aujourd’hui, nous rendons également aux collaborateurs de nouveaux services qu’ils n’avaient pas l’habitude d’avoir. Il y a quelques années, nous livrions un véhicule avec un guide et le collaborateur se débrouillait. Aujourd’hui, nous essayons davantage de lui montrer son importance, de créer un lien avec lui en l’informant sur le loueur et son réseau. Nous avons par exemple mis en place cette approche avec le système «MyLeasePlan» il y a maintenant deux ans. Par ailleurs, nous réalisons systématiquement après chaque livraison un appel auprès du conducteur pour s’assurer que la prise en main du véhicule s’est bien passée et lui expliquer tous les services auxquels il a droit. Il s’agit d’une démarche récente. Cependant, nous constatons que nous avons de plus en plus d’appels de conducteurs qui nous sollicitent pour la délivrance de services.
Jean-Marc Prince : La prise en main du véhicule est un acte très important. A un moment, elle n’a d’ailleurs pas été considérée à sa juste valeur. Aujourd’hui, toute la technologie embarquée dans les voitures doit être expliquée au conducteur. Il s’agit de petites options qui parfois sont basiques mais qui néanmoins doivent lui être présentées. Si, en tant que constructeur, nous ne faisons pas cette démarche, nous courrons le risque que le conducteur n’utilise jamais ces services.
Edouard Rance : Il ne faut pas laisser partir un conducteur dans un nouveau véhicule sans avoir procédé à une mise en main, quelle que soit la voiture. La mise en main est un service et il faut qu’il soit délivré par une personne compétente pour le faire. Gage de son importance dès que nous enregistrons une livraison de véhicule, il y a automatiquement un questionnaire de satisfaction remis au conducteur.
Emmanuel Foreau : Il est important que les gestionnaires de parc aient un retour sur ce service. Cette enquête de satisfaction est, à notre sens, indispensable. Le gestionnaire de parc doit s’assurer du niveau de la qualité de service sur l’ensemble des process de gestion et des prestations de service