We.trade, première plateforme blockchain pour le commerce international, est née de la volonté d’un consortium de neuf banques européennes, dont Société Générale, de mieux accompagner le développement des entreprises dans leurs échanges commerciaux, notamment à l’international.
Aujourd’hui, pour sécuriser et financer une transaction de commerce international, les entreprises ont surtout recours au crédit documentaire. Un dispositif qui apporte au vendeur et à l’acquéreur un équilibre et un rapport de forces certain mais dont la mise en place est parfois trop complexe, longue et coûteuse pour des échanges simples et de petits montants. «Cet instrument est ainsi peu utilisé pour les opérations entre PME européennes qui ont donc plutôt tendance à prendre le risque du paiement d’avance ou de l’expédition d’avance, quand elles ne renoncent pas tout simplement aux opportunités commerciales jugées incertaines et risquées», explique Anne-Claire Gorge, responsable des produits et de l’innovation pour le commerce international au sein de Société Générale. Parallèlement, depuis 2015/2016, la technologie blockchain est présentée par beaucoup comme une technologie prometteuse, offrant des perspectives intéressantes et de nouvelles opportunités pour le «trade finance» grâce à son caractère distribué permettant une vision synchronisée et partagée entre les acteurs dans un cadre hautement sécurisé.
Un consortium de banques pour un projet européen
C’est sur la base de ce constat d’un vrai besoin des entreprises et de l’émergence d’une nouvelle technologie pouvant aider à y répondre qu’un consortium de banques internationales (Deutsche Bank, HSBC, KBC, Natixis, Rabobank, Unicredit, Société Générale, rejoints rapidement par Santander et Nordea) s’est, depuis janvier 2017, attelé à la création de we.trade pour financer, sécuriser et simplifier le commerce international des entreprises. «Nous avons uni nos forces pour développer une nouvelle solution permettant de répondre aux besoins des entreprises européennes et s’appuyant sur les possibilités offertes par les technologies blockchain (transmission et sécurisation de données et non plus de documents), précise Anne-Claire Gorge. En à peine dix-huit mois, l’offre complète a été construite : une nouvelle solution bancaire définie et inscrite dans un cadre juridique, un fournisseur technologique choisi (IBM), une solution technique développée dans une perspective de mise en production, et une gouvernance définie pour la société qui détiendra, opérera et distribuera la solution aux banques qui, elles-mêmes, offriront ce service à leurs clients.» Aujourd’hui, la phase de test touche à sa fin et la mise en production de we.trade est prévue pour cet été.
We.trade simplifie les transactions commerciales
We.trade est une plateforme partagée destinée à rendre plus faciles les transactions domestiques et transfrontières pour les sociétés européennes. Elle permet de connecter toutes les parties engagées dans une transaction commerciale : l’acheteur, le vendeur et leur banque respective. «Au travers de we.trade, le vendeur et l’acheteur conviennent ensemble des termes de la commande (ce qui est acheté, le volume, le prix…) et des conditions de déclenchement du paiement», explique Anne-Claire Gorge. Dès lors qu’elles se sont mises d’accord, la transaction est validée et prend la forme d’un contrat électronique. Il revient ensuite à la plateforme de suivre les différentes étapes de la transaction et, dès qu’elle arrive à son terme, de déclencher l’instruction de paiement auprès de la banque de l’acheteur, dans le respect des conditions de règlement négociées. Une des conditions peut être liée au suivi de colis disponible pour plus de 400 transporteurs. «La banque de l’acheteur peut également proposer de garantir le paiement à l’exportateur via cette plateforme, ajoute Anne-Claire Gorge. Celle de l’exportateur peut pour sa part financer ses factures, de manière à préserver sa trésorerie.»
De fortes ambitions d’expansions fonctionnelles et géographiques
«Avec we.trade, nous avions clairement l’ambition d’aller au-delà d’un simple “proof of concept” et de proposer rapidement une innovation concrètement utilisable, précise Anne-Claire Gorge. Afin de conserver une agilité et d’avancer rapidement, nous avons volontairement, lors de la phase de construction de cette première version, restreint le nombre de banques et le périmètre géographique au minimum nécessaire à la viabilité de la plateforme. Si dans un premier temps la solution ne sera accessible qu’aux clients des banques du consortium, notre ambition cependant est d’accueillir rapidement de nouvelles banques afin d’étendre la couverture de la solution et son périmètre géographique. De même, cette première version sera progressivement enrichie de nouvelles fonctions.» A terme, we.trade pourrait par exemple s’enrichir de fonctionnalités liées à un suivi amélioré du transport des marchandises, à la confirmation de la qualité ou de la conformité des produits exportés, etc. «Nous entendons ainsi au travers de cette initiative, non pas remplacer le crédit documentaire qui reste un dispositif efficace et pertinent pour les transactions les plus sensibles et pour le grand export, mais préparer l’avenir et accompagner la transformation profonde de nos métiers, en offrant une solution simple et efficace à nos clients», conclut Anne-Claire Gorge.
Questions à… Philippe Bouchard, directeur de la trésorerie et du credit management EMEA de Steelcase
Leader mondial, Steelcase développe une vaste gamme de solutions innovantes pour les espaces tertiaires, d’enseignement et de formation, complétée par de nombreux services, dont le conseil ou le recyclage du mobilier en fin de vie. Le mobilier de Steelcase s’inspire des recherches innovantes en termes de conception d’espaces de travail. Depuis plus de cent cinq ans, Steelcase travaille avec les organisations leaders du monde entier, tous secteurs confondus, afin de créer des espaces qui amplifient la performance, l’engagement et le bien-être de leurs collaborateurs. Steelcase est présent dans le monde à travers un réseau de plus de 800 concessionnaires (dont environ 400 en EMEA), et dispose de plusieurs usines dans le monde entier (dont quatre en EMEA). Chiffre d’affaires mondial : 3 milliards de dollars pour l’année fiscale 2018. A ce poste, Philippe Bouchard s’occupe notamment des relations avec les concessionnaires, clients directs et fournisseurs de Steelcase sur son périmètre géographique.
Pourquoi avez-vous accepté de participer à la phase pilote de we.trade ?
Nous travaillons avec un réseau de concessionnaires et de fournisseurs répartis dans le monde entier. Aujourd’hui, lorsque nous traitons des affaires d’un montant important ou dans un pays que nous considérons «à risque», nous utilisons le crédit documentaire pour sécuriser nos paiements. Ce dispositif, s’il nous est indispensable, nécessite un contrôle et une négociation minutieux des termes applicables, la mobilisation de plusieurs équipes en Europe et aux Etats-Unis, de très nombreux documents papiers et un traitement manuel consommateur de beaucoup de temps et d’énergie. Nous sommes donc particulièrement attentifs à ce que pourraient nous apporter les nouvelles technologies digitales, et en particulier la blockchain. D’où notre implication dans la phase de test de we.trade, avec deux de nos concessionnaires et un fournisseur.
Qu’attendez-vous de la plateforme we.trade ?
La mise en place et le suivi des garanties bancaires nécessite une véritable expertise dont seule notre credit manager dispose aujourd’hui – il y consacre d’ailleurs près d’un tiers de son temps. Avec we.trade, la gestion des garanties bancaires sera entièrement délocalisée auprès de notre équipe de back-office, libérant ainsi notre credit manager. D’autre part, en permettant la digitalisation des documents, cette plateforme contribuera à sécuriser, fluidifier et faciliter les échanges avec nos partenaires commerciaux, leur banque respective et notre banque. Nous réaliserons d’importantes économies, en temps et en papier.
Quelles sont les évolutions que vous en attendez ?
Pour le moment, le recours à la plateforme we.trade ne peut se faire que pour des transactions commerciales en Europe, qui pour nous présentent peu de complexité. En revanche, nous sommes très intéressés par les évolutions annoncées de cette plateforme sur d’autres zones géographiques, en particulier sur le Moyen-Orient. Nous espérons ainsi que la technologie blockchain contribuera à accélérer nos flux de paiement, notamment hors de la zone SEPA.