Selon la chambre criminelle de la Cour de cassation, la responsabilité du dirigeant social peut être engagée indépendamment du fait que la faute reprochée soit ou non séparable de ses fonctions, à la différence des chambres civiles.
Par Arnaud Langlais, avocat associé, DS Avocats
Par deux arrêts de sa chambre criminelle du 5 avril 2018 , la Cour de cassation vient d’introduire une incohérence dans le régime de la responsabilité des dirigeants sociaux.
Dans la première espèce, une société et son dirigeant social avaient fait l’objet de contraventions pour non-respect de l’emploi de salariés en heures complémentaires et avaient été condamnés à réparer le préjudice en résultant.
Dans la seconde affaire, une société et son dirigeant avaient été définitivement relaxés des faits d’abus de confiance pour lesquels ils étaient poursuivis. Mais, sur appel des parties civiles, le dirigeant social a été condamné à les indemniser.
Dans les deux cas, les dirigeants ont introduit un pourvoi au motif que les faits reprochés ne constituaient pas une faute intentionnelle d’une particulière gravité incompatible avec l’exercice normal des fonctions sociales, reprenant en cela la jurisprudence bien établie des chambres civiles de la Cour de cassation. En effet, cette dernière considère que lorsque la faute est «séparable» des fonctions de dirigeant, alors ce dernier ne peut voir sa responsabilité engagée envers les tiers.
La chambre criminelle, après avoir longtemps considéré qu’il était nécessaire que les faits reprochés soient constitutifs d’une infraction pénale pour être susceptibles d’engager la responsabilité civile de la personne mise en cause, a opéré un revirement de jurisprudence par un arrêt du 5 février 2014 . Elle a alors considéré que la responsabilité du prévenu pouvait uniquement résulter d’une simple faute civile.
Elle n’avait pas eu l’occasion jusqu’ici de confronter sa nouvelle jurisprudence à un dirigeant social.
Au travers du rejet des pourvois au motif que les moyens soulevés par les dirigeants sur la base de la jurisprudence civile étaient inopérants, la chambre criminelle a pu préciser sa position et confirmer sa jurisprudence précédente.