« Il ne résulte d’aucun texte ni d’aucun principe qu’une société mère a, lorsqu’elle cède les parts qu’elle détient dans le capital social d’une filiale en état de cessation des paiements, l’obligation de s’assurer, avant la cession, que le cessionnaire dispose d’un projet de reprise garantissant la viabilité économique et financière de cette filiale. »
Telle est la motivation par laquelle la chambre commerciale de la Cour de cassation a définitivement écarté, dans un important arrêt du 1er mars 20232, toute faute de la part de l’ancien actionnaire d’une société en difficulté auquel il était reproché de s’être « débarrassé » à vil prix de sa filiale en la cédant à un acquéreur peu sérieux, la filiale ayant été placée en liquidation judiciaire et l’ensemble de ses salariés ayant été licenciés quelques mois après la cession. Retour sur une décision méritant toute l’attention des praticiens du distressed M&A et des contentieux en résultant.
1. Une illustration des risques inhérents aux cessions distressed
Une telle affaire constitue tout d’abord une parfaite illustration des risques contentieux liés aux opérations de distressed M&A, dont nous avions dressé le tableau dans un précédent article paru dans ces colonnes3.
Le 18 octobre 2011, une société allemande cède, pour un euro, l’intégralité du capital de sa filiale française sous-performante à un repreneur allemand dont le projet consiste à redresser l’activité de la cible française via une renégociation à la hausse, à hauteur de 30 %, des prix pratiqués avec son principal client. Ce projet se révèle très rapidement être un échec. Le 21 novembre 2011, la cible est placée en redressement judiciaire et sa date de cessation des paiements fixée au 31 juillet 2011 (soit avant la cession). Le redressement est converti en liquidation judiciaire le 9 mai 2012 et les salariés sont licenciés le 30 mai 2012.
Le séquencement des opérations (procédure...